ENCYCLOPEDIE -DE--LA--LANGUE -FRANCAISE

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Histoire
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La déforestation au XXe siècle

 


 

 
"Officiers des Eaux et Forêts surveillant le marquage d'une coupe, le martelage des fûts qui sert à indiquer les arbres à conserver. C'est l'époque où le roi se réserve les chênaies de Tronçais, Bellême et Réno-Valdieu."

Anonyme, XVIIIe, Mairie de Raon-l'Etape.

Texte et illustration extraits du magazine Géo n°187

 


 


 
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Un peu d'histoire : Des origines au XXe siècle

 

Il y a huit mille ans, avant les débuts de l'agriculture humaine, on estime que les forêts recouvraient environ 40% des terres du globe, soit à peu près 6 milliards d´hectares (Bryant, 1997; Learman and Sedjo, 1992). Aujourd'hui, ces chiffres représentent respectivement 23,3 % pour 3,5 milliards d'hectares, la différence ayant été produite en grande partie au XXe siècle. De la totalité de l'aire boisée actuelle, 2 milliards d'hectares se trouvent dans les pays en voie de développement, la plus grande partie dans les régions tropicale et sous-tropicale (FAO, 1997) : c'est donc vers elles que nous porterons surtout le regard, après avoir survolé ces quelques milliers d'années d'histoire, entre la forêt et l'homme. Il ne s'agit pas ici, bien évidemment, d'analyser tous les aspects de cette histoire, mais d'examiner ce qui, au cours du temps, se rapporte à l'abattage des arbres et à ses nombreuses conséquences.

(extrait de http://www.rcfa-cfan.org/french/f.issues.12-3.html)


Dans ce qui sera la France, on commence à parler d'abattage massif avec la Gaule de l'époque romaine. Même si elle était encore bien " chevelue ", comme la surnommait Jules César, elle n'en devint pas moins le grenier à blé de son empire, cause de bien des défrichements. La forêt soufflera ensuite un peu, pour regagner du terrain pendant les invasions barbares, jusqu'à occuper environ 20 millions d'hectares. Mais ce répit sera de courte durée. "Passées les grandes invasions/migrations, un monde nouveau était à rebâtir; plus exactement, à reconquérir; et pour la France, plus particulièrement dans les zones les moins anciennement romanisées. Après 200 à 250 ans d'abandon, la majorité du sol européen occidental n'était plus que landes, marécages - drainages disparus - et forêts. Les monastères devinrent des centres d'opérations dont les moines, encadrant la population, se mirent à raser les broussailles, brûler des montagnes de ronces et de taillis, et pour ce qui nous concerne, à abattre les arbres.

 
Moines abattant un arbre

Moralia in Job de Grégoire le Grand

scriptorium de l'abbaye de Cîteaux
 
1111

Bibliothèque Municipale de Dijon
Manuscrit 173, folio 41

Un prodigieux volume de bois fut donc disponible et à valeur marchande nulle, ce qui lui donna des emplois presque universels : habitations; premiers châteaux forts où tout, murailles tours et même le dominium ancètre du donjon, était fait de troncs équarris; roues hydrauliques; ponts; engrenages de moulins ( à "lanternes" ); grues primitives et chèvres de levage; araires; chariots; seaux et récipients divers; sabots; métiers à tisser; conduites d'eau... sans parler de ce qui, à cette époque, ne pouvait être fait d'un autre matériau que le bois : barques, navires, etc."

extrait de la page web : http://www.stratisc.org/act/bru/act_bru_hisguerre_30.html


Le Moyen-âge est un mauvais souvenir pour la forêt française. Les seigneurs ont la mauvaise idée de la troquer contre une main-d'œuvre corvéable à merci. Pour une somme symbolique, ils octroient aux SDF de l'époque, en quête de toit bon marché, les " aisances " ou " usances " des forêts. Ces dernières permettaient de couper le bois pour tous leurs besoins : construction, nourriture des hommes et des bêtes, chauffage. Et plus les manants avaient de descendance, plus les arbres disparaissaient, bien sûr!


Les Européens partent ensuite à la conquête du Nouveau Monde et ce sont les esclaves amenés d'Afrique qui abattent les arbres au Nord, pour que les colons puissent exploiter de vastes espaces agricoles et d'élevage intensif. Plus au sud, des forêts les plus accessibles du Brésil et des Caraïbes, le long des côtes, laissent place aux champs de canne à sucre.


Les colonies commenceront de mettre à mal les forêts d'Amérique, mais aussi, elles entameront un peu plus les réserves de l'Europe. "La France périra faute de bois ", mis en garde Colbert, dirigeant les Finances et les Eaux et Forêts. Cette France là, celle de Louis XIV, est en guerre et épuise les forêts de la couronne. Poutres, madriers, chariots, caisses, tonneaux, affûts de canon, tout cela est en bois. On abat des arbres pour que le royaume renforce ses forteresses du Nord-est contre l'Autriche, contre l'Angleterre, dans la sidérurgie ou la construction navale : vains sacrifices, quand on sait que 15 bateaux sur 44 coulèrent par le fond à la bataille de la pointe de le Hougue, en 1692 ! Louis XV fera de même pour concurrencer l'Angleterre dans les nouvelles colonies : Inde, Canada.
Napoléon n'ira pas, lui, par quatre chemins. Dans le but de battre l'Angleterre, il rebâtira une flotte de guerre en abattant les plus beaux chênes de la forêt de Soignes, en Belgique : encore raté, puisque les défaites de Trafalgar et de Boulogne sont retentissantes ! On est au début du XIXe siècle, et la surface de la forêt française est réduite à peau de chagrin : 8 millions d'hectares ! Louis XVIII et Charles X auront beau recréer une administration autonome et un nouveau code forestier, lutter contre les voleurs de bois et autres braconniers, la France se chauffe toujours au bois, et bientôt, elle en brûlera aussi dans les chaudières de locomotives et dans les steamers. Quand le réseau de canaux reliera les fleuves entra eux, les péniches amèneront des mines du Nord le charbon à meilleur compte, et on pourra commencer à donner un nouveau souffle à la forêt. On va de moins en moins abattre d'arbres sans réfléchir, et on le fera dans un cadre de plus en plus harmonieux pour la forêt.
Mais la France n'est pas le monde et, si les pays industrialisés, devenus riches, peuvent se tenir, enfin, au chevet de leurs forêts, les pays pauvres ou en voie de développement ne peuvent pas encore se payer le même luxe et se servent presque sans compter de cette manne qui, pourtant, n'est pas éternelle et qui, en s'éteignant, entraîne bien des êtres avec elle, nous le verrons plus loin. Entre 1850 et 1980, 15 % des forêts du monde ont été défrichées (Rowe et. al, 1992). Ensuite, si les pays industrialisés des zones tempérées ont vu leurs forêts s'accroître de 0,1 % dans la décennie 1980-1990, dans les pays en développement, le rythme annuel de la déforestation se chiffre à 15,5 millions d´hectares pour la période allant de 1980 à 1990 et à 13,7 millions d´hectares pour la période 1990-1995. 15 millions d'hectares de forêts, c’est l’équivalent d’un terrain de football toutes les deux secondes, c'est aussi la taille du manteau forestier français. Au total, au cours de cette période de 15 années, c´est environ 200 millions d´hectares de forêt qui ont disparu : une superficie plus grande que le Mexique ou l'Indonésie !

Cette petite introduction au XXe siècle nous a montré, en quelques chiffres, le tragique tournant pris dans l'histoire des forêts qu'est la déforestation. C'est l'abattage des arbres à grande échelle, entraînant en cascades de multiples conséquences, que nous allons tenter maintenant de mettre en lumière.


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