ENCYCLOPEDIE -DE--LA--LANGUE -FRANCAISE

ABBAYE
 

---------Origines -Temps des Mérovingiens

          - Saint Columban

 


 

 Saint Colomban (Columban)
  Fête le 21 novembre (Martyrologie romaine)
ou---le 24 novembre (Bénédictins, Irlandais)

   Naissance 543 - Leister, Irlande

 Mort 615 - Bobbio, Italie

 

La vie

De la naissance à l''exil"
Les fondations monastiques
Les temps difficiles
Sur les chemins
Le bout du voyage : Bobbio

L'oeuvre

 


La vie

De la naissance à l''exil"


Columban ( ou Colomban, en latin Columbanus) naît exactement la même année qui voit mourir le père des Bénédictins, Benoît de Nursie. Son nom est classique en Irlande, et signifie colombe. On connaît par les écrits de Bède un certain Columban né vers 521 et fondateur des monastères de Derry, Durrow et Iona (Bède : Histoire Ecclésiastique, III, 4), il s'agit d'un autre Columban, auteur du fameux Cathach.

Sa vie a été écrite par Jonas, un moine italien de l'abbaye de Bobbio, vers 643. Cet auteur a vécu pendant l'abbatiat d'Attala, le successeur immédiat de Columban, et ses informateurs avaient été les compagnons du saints. l'historien Mabillon, dans le deuxième volume de son "Acta Sanctorum O.S.B."restitue cette biographie, avec une annexe sur les miracles du saint, écrit par un membre anonyme de l'abbaye de Bobbio.

d’une mère chrétienne, il fut confié, selon la coutume irlandaise, à un fer leighinn (homme lisant), de qui il apprit le latin. Son éducation littéraire et sa formation religieuse furent acquises au sein des monastères de Clauin Inis ( "île penchée") et Bangor.

Il était de belle allure, et dut ainsi être exposé aux tentations charnelles avec plusieurs femmes. Finalement, il s'estconfié à une religieuse, qui lui a tenu ce langage :

" Il y a douze ans je me suis enfui du monde et me suis fermé dans cette cellule. Ne vous rappelez-vous pas ce qui est arrivé à Samson, David et Solomon, tous détournés de la bonne voie pour l'amour des femmes ? Il n'y a donc aucune sécurité pour vous, jeune homme, sauf à vous échapper."

Sagement avisé, Columban écoute ce conseil et se retire du monde. Il rencontra semble t-il l'opposition de sa mère, qui s'efforça de le retenir en se mettant au travers de son chemin, mais, dominant sa compassion, il laissa sa mère prostrée et s'en alla pour toujours de la maison.

Son premier maître fut l'abbé Sinell de Cluaninis (Clonard) à Lough Erne. Sous sa bienveillance il composa un commentaire des Psaumes. Puis il partit de lui-même au monastère renommé de Bangor, qui à avait ce temps-là Comgall pour abbé. Là il embrassa l'état monastique et mena en ces lieux plusieurs années de vie fervente, faite de prières et d'étude. Vers quarante ans, il lui parut entendre la voix de Dieu, lui proposant de prêcher l'Évangile dans les pays étrangers. Son abbé refusa de le laisser partir, mais il finit par lui donner son consentement.


Il part ainsi vers le continent, douze compagnons avec lui : Attala (saint), Columban le jeune, Cummain, Domgal, Eogain, Eunan, Bile (saint), Gurgano, Libran, Lua, Sigisbert et Waldoleno. Le groupe fait une halte en Grande-Bretagne, vraisemblablement sur la côte écossaise, puis arrive sur les côtes franciques, vers
585.


Les fondations monastiques


Ce débarquement est le début d'une dynamique de ferveur dont le continent avait bien besoin : le désarroi, le trouble jeté par société les incursions barbares, agitaient autant la société civile gallo-romaine que la société religieuse. Les prédicateurs irlandais allaient redonner un nouvel élan à la vie religieuse, par leur ardeur, leur goût de l'étude, du dépassement. Leur réputation arrive tout naturellement aux oreilles des princes, en particulier celles de Gontran, roi de Bourgogne. Gontran l'accueille favorablement à sa cour, l'invitant même à demeurer dans sor royaume. Il lui octroie un domaine dans les solitudes des montagnes vosgiennes et c'est là, à la place de la forteresse romaine en ruine d'Annegray (sur la commune actuelle de Voivre, en Haute-Saône), que Columban fondera son premier monastère. Dans cette retraite, l'abbé et ses moines mèneront une vie des plus simples, se nourrissant souvent de plantes forestières, de baies et d'écorces de jeunes arbres.

La renommée du monastère se fit vite grandissante, et nombreux sont ceux, paysans ou nobles, qui demandèrent à y entrer ou qui y vinrent pour guérir leurs maux par les prières. Cependant, Colomban cultivait la solitude en se retirant souvent dans une caverne située à sept milles de là, se servant d'un de ses moines pour établir le contact entre lui et la communauté qui, année après anné, devenait de plus en plus importante. En conséquence, Columban obtint en 590 du même roi Gontran le château gallo-romain de Luxeuil, distant d'environ huit milles d'Annegray. Mais bientôt, celui-ci ne tarda pas à manquer de place pour accueillir tous ceux qui aspiraient à la vie monastique. Un troisième monastère est donc érigé à Fontaines.

Colomban demeurait abbé des trois communautés qu'il avait fondées. Pour elles, il écrivit sa propre Règle, inspiré des coutumes de Bangor et, plus encore, de la culture celtique dont il était issu.

Le fondateur de Luxeuil instaura, d'autre part, la laus perennis (Montalembert, les Moines de l'Ouest II, 405).


Les temps difficiles


Colomban demeura en France presque vingt ans, et il serait probablement resté encore longtemps, si les évêques gaulois ne lui avaient mis les bâtons dans les roues.

Il faut dire que Colomban n'allait pas par quatre chemins : Il n’avait pas, par exemple, pris la peine de solliciter l’autorisation de l’ordinaire de Besançon pour y établir ses établissements monastiques, comme l’y obligeaient les conciles d’Agde (506) et d’Epaonne (517), qui ne faisaient que préciser les directives du concile de Chalcédoine (451), qui avait subordonné la fondation des monastères à la permission de l'évêque local, soumettant ainsi les actions individuelles à la bienveillance (ou au contrôle) du clergé. Ce fait avait pourtant été toléré, probablement parce que Colomban était protégé par la bienveillance des grands de Bourgogne. Mais, d'une part, les évêques n'en purent plus de supporter les libertés que prenait de jour en jour l'abbé irlandais, sans compter que sa renommée grandissante devait leur causer beaucoup de jalousie et leur faire de l'ombre, et, d'autre part, Columban s'était permis de reprocher à Thierry II, petit-fils de la reine Brunehaut, son concubinage, ce qui pouvait porter préjudice aux ambitions de la reine, fait que nous allons bientôt expliciter, car il est à l'origine de l'expulsion de Columban des terres burgondes. Avant cela, pour comprendre ce qui vien d'être dit des libertés prises par Colomban, il faut préciser que le monachisme irlandais ne se soucie pas beaucoup des évêques. En Irlande, les frontières entre abbaye et évêché ne sont pas claires, le concept de siège épiscopal non plus, et les limites mêmes des charges abbatiales ou épiscopales ne sont pas établies une fois pour toutes (elles se cumulent parfois).
 
 
Thierry II était placé complètement sous le joug de sa grand-mère, Brunehaut. A la mort du roi Gontran, la succession est passée à son neveu, Childebert II (570-596), le fils de Brunehault. À sa mort, ce dernier laissait deux fils, Théodebert II et Thierry II, tous les deux mineurs. A Théodebert échut l'Austrasie, à Thierry, la Bourgogne, mais Brunehault s'était constituée leur tutrice et ainsi, tenait de fait les rênes des deux royaumes. S'étant entièrement vouée au pouvoir, elle encouragea Thierry à demeurer dans le concubinage, afin de n'avoir pas de rivale, en tant que reine. Thierry, cependant, avait une vénération pour Columban et le visitait souvent. À ces occasions le saint l'avertit de ses fautes, nous l'avons dit, et le réprimanda, mais en vain. Brunehaut entra alors dans une colère noire, et mit de son côté les ecclésiastiques et les grands du royaume pour accuser Colomban de ne pas respecter les usages du pays.
 
L'abbé irlandais prend soin, par exemple, d'établir une hostellerie à côté du cloître et d'interdire l'accès de ce dernier aux personnes du siècle. Il entre à ce sujet en conflit avec le roi Thierry II , mais surtout, les évêques s'irritèrent de son entêtement à conserver le calendrier pascal tel qu'on l'observait encore dans les rites celtiques, et différent du rite romain. Pourtant, Colomban avait bien accepté certaines décisions pris lors des conciles cités plus haut, concernant l'autorité des évêques sur les abbés, sommés de se présenter périodiquement devant leurs évêques pour recevoir conseils ou réprimandes, chose pourtant inconnue dans l'église celtique. Il les avait peut-être acceptées, mais un peu trop rapidement sans doute car, pendant l'année 602, il ne se présenta pas à une convocation des évêques qui le mandèrent pour le juger. Pour toute réponse, il leur fit une lettre où il parlait tout à la fois de charité, de liberté et de révérence : une lettre dont le ton dut sonner bien étrangement aux oreilles des prélats continentaux. Par ailleurs, il se permit de conseiller aux ecclésiastiques de tenir plus souvent des synodes et de s'occuper de questions aussi importantes (sinon plus?) que la date de Pâques, dont on peut aisément comprendre ce qu'il en pensait quand il dit : "Je ne suis pas l'auteur de cette divergence. Je suis venu ici comme un pauvre étranger pour la cause du Christ, notre Sauveur. Je demande une seule chose de vous, très saints Pères, c'est de me permettre de vivre dans le silence de ces forêts, près des os de dix-sept de mes frères disparus désormais."

Mais les évêques ne furent pas émus de son innocence et de sa simplicité. Ils persistèrent de croire et d'affirmer qu'il était dans l'erreur. Columban répondit à ces attaques selon la règle de saint Patrick, en soumettant la question au pape, qui était à l'époque Grégoire le Grand. Les deux premières lettres qu'il adressa au pontife ne lui furent par remis ou ne parvinrent à destination, quant à la troisième, si on la retrouve dans la correspondance de Grégoire, elle n'a jamais reçu de réponse, événement peut-être concomitant avec la mort du pontife, en 604. Cette lettre défendait avec autant de douceur que de liberté la tradition celtique. Tout comme celle adressée à son successeur Boniface IV, dont la réponse a été perdue, alors même que Columban se trouvait en Italie, hors de la juridiction des évêques francs. Les accusations ayant cessé après son départ, on peut supposer que Columban avait cédé sur le point de la date pascale.
 
Pour toutes les raisons que nous avons évoquées, Colomban est sommé par Thierry de se conformer aux usages du pays, chose qu'il refusa, et qui lui valut de se faire emprisonné à Besançon, vers 610. Cependant, il devait être sous surveillance assez lâche, puisqu'il réussit à retourner à Luxeuil. Bien entendu, à cette nouvelle, Brunehault entre dans une colère épouvantable et chasse le moine irlandais, escorté par des soldats jusqu'à Nantes, où un bateau devait le ramener dans son pays natal. On dit aussi que la reine fut vexée par l'interdiction que Colomban lui avait faite d'entrer dans ses monastères dont sa Règle interdisait l'accès aux femmes.
 
Sur le chemin de retour il visite le tombeau de saint Martin et envoie une lettre de mauvais augure à Thierry, lui annonçant sa mort et celle de sa progéniture dans les trois ans à venir. Il envoir une autre lettre à sa communauté, qu'il confie à Attala. Quand il finit par s'embarquer pour l'Irlande, une tempête refoule son bateau vers la terre, et le voilà de retour sur le continent...Providence?

Colomban en Suisse

Colomban décide de partir vers la Neustrie, chez le roi Clotaire (ou Clothaire), où il est bien accueilli. Mais Colomban se jette à nouveau sur les routes. Continuant son périple à travers la Gaule, rencontra Chagnéric, père de Faron (futur évêque de Meaux et protecteur des Scots), de Cagnoald (futur évêque de Laon) et de Fara (future fondatrice de Faremoutiers). Il rencontra également à Pipimisium le seigneur Autcarius ou Authaire, haut fonctionnaire royal, père d’Adon, de Dadon (futur St Ouen et évêque de Rouen) et de Radon (chargé des trésors de Dagobert et devenu moine à la fin de sa vie).
 
En 611, il est à la Cour d'Austrasie, à Metz, où règne Théodebert (Theudebert) qui, à son tour, lui fait bon accueil. Mais ce n'est pas encore là que Colomban se fixera. Il fit une brève apparition à Annegray, pour confirmer la responsabilité de St Eustaise sur Luxeuil et choisir quelques moines qui devaient l’accompagner en Suisse et en Italie : St Gall, St Cagnoald et St Jonas de Suze (ou de Bobbio). Avec eux, il partit évangéliser les Alamans et les Suèves.

Colomban demanda à Theudebert la permission de traverser ses territoires.  "Theudebert lui demanda de bien vouloir fonder un monastère sur son royaume afin de répandre le christianisme parmi son peuple. Theudebert sembla avoir une préférence pour Bregenz. Ceci explique peut-être le détour par le lac de Zurich pris par Saint Colomban et ses moines.

La petite communauté arriva à Bâle vers 611 en venant par voie fluviale sur le Rhin,. Là, le moine Ursian se sépara du groupe et alla dans le Jura fonder un ermitage. Cet ermitage fut à l’origine de l’abbaye de Saint-Ursanne.

De Bâle, les moines remontèrent le Rhin et ensuite l’Aar jusqu’au confluent de la Limmat. Fatigués de ramer les moines décidèrent de poursuivre leur voyage à pieds en longeant la Limmat jusqu'à Zurich et ensuite le bord du lac de Zurich par Thalwil jusqu'à Tucconia (aujourd’hui Tuggen).

Arrivés à Tucconia à la fin de l’été 611 ils décidèrent d’y séjourner. Tucconia devait rappeler aux moines irlandais leur patrie. Cette région se trouve entre des collines très vertes près d’un lac. Ils s’établirent sur la hauteur d'Egg au sud-ouest de Tucconia. D'ailleurs on peut encore aujourd’hui y trouver un fontaine du nom de Gallusbrünnlein, c'est-à-dire petite fontaine de Gall.

Les habitants de la région étaient  partiellement ou complètement déchristianisés. Ils avaient des manières rudes et cruelles. En effet, les Alamans et les Suèves avaient imposé aux habitants leur culte aux idoles. Les moines commencèrent aussitôt leur travail d’évangélisation. Malheureusement les gens de la région n’étaient pas très ouverts à la Bonne Nouvelle apportée par les moines. Ils continuèrent à adorer leurs idoles et à leur apporter des offrandes.  Saint Colomban n’hésita pas à détruire ces offrandes. Saint Gall, disciple de saint Colomban, brûla les idoles installées dans l’église. Suite à ces actes, les habitants de Tucconia décidèrent de tuer saint Gall et de fouetter saint Colomban, pour ensuite l’expulser. Heureusement quelques habitants avertirent saint Colomban qui réussit à s’enfuir à temps. En quittant Tucconia, saint Colomban prophétisa que les habitants de Tucconia seraient battus par une épée étrangère et ensuite christianisés. Colomban avait bien vu : 30 ans plus tard, vers 650, des Francs ou des Alamans arrivèrent dans la région, vainquirent les habitants et les christianisèrent.

Fuyant Tucconia, les moines partirent pour la Turgovie qui était incorporée à l’Austrasie depuis 610. Ils prirent vers l’est le col du Ricken qui relie le Tösstal et le Toggenburg. Dans le Toggenburg ils suivirent la Thur jusqu'à Bischofszell en faisant certainement un détour par le pays de l’Appenzell ou encore aujourd’hui on trouve près de Herisau une grotte du nom de Columbanshöhle, c'est-à-dire grotte de Colomban, en patois local Sanggelebo.

Par Arbon les moines arrivèrent enfin à Bregenz,  importante étape de ce long voyage. Là, ils trouvèrent une petite église de sainte Aurelia dans laquelle les Alamans avaient installés des images et statues d’idoles. Aussitôt ils entreprirent de détruire ces idoles et de rendre la chapelle à sa destination originelle, le culte au Dieu Unique et Véritable. Près de cette chapelle, les moines s’installèrent et fondèrent un petit monastère. Ainsi fut fondé le monastère de Bregenz (...)"

Gall (Cellach en gaélique, Gallus en latin), s’était déjà rendu sur la frontière rhénane où il s’était frottéé aux langues étrangères. Etant tombé malade et, ne pouvant continuer le voyage, il demanda à Colomban la permission de s’arrêter pour finir, en cet endroit, une vie retirée du monde. Non loin du lac de Constance, il se fit bâtir une cellule et mourut quelques années plus tard. Au lieu où se produisirent ces faits, s’érigea, en son honneur, une église transformée, au VIIIe siècle, en abbaye dédiée à son nom.Ayant laissé derrière eux leur frère souffrant, Colomban, Cagnoald et quelques autres, s’étaient enfoncés dans les collines du Voralberg autrichien. Notons aussi que Thierry avait vaincu Théodebert, ce qui lui offrait le Rhin supérieur, et qui donnait sans doute quelque craintes (justifiées) à Colomban.

"(...) Saint Gall  lui demanda de pouvoir rester dans la région afin de continuer le travail des moines, ce qui fut accordé. En revanche, il se vit interdire de célébrer la Divine Liturgie du vivant de son maître. On ne connaît pas vraiment la raison de la sévérité de saint Colomban envers son vieux compagnon de route. La maladie en est-elle le seul motif? Ou bien est-ce pour châtier un manque de confiance de saint Gall envers saint Colomban, qui aurait pu le guérir comme les autres compagnons de route qui, eux aussi malades, furent guéris par l'abbé. Saint Gall rétabli, il construisit un ermitage qui devint le monastère sur lequel fut fondée la ville de Saint-Gall. Il obéit cependant et ne célébra pas jusqu'à la naissance au ciel de saint Colomban. Ce dernier, sentant la mort approcher, fit parvenir à saint Gall son bâton, signe de bénédiction et de réconciliation.

Saint Colomban et ses moines partirent pour Coire en passant par Bivio-Stalla, ils franchirent le col du Septimer. Selon certaines sources un des moines (Sigisbert) aurait quitté la communauté à Coire pour fonder un ermitage près de Disentis. Cependant la fondation du monastère de Disentis n'aurait eu lieu qu'un siècle après la mort de saint Colomban par des moines appartenant à un mouvement pirminien (saint Pirmin, moine irlandais).
Les moines atteignirent Milan après un dur voyage à travers les alpes."

extraits de : http://www.orthodox.ch/st-col-1.htm, texte de Diacre Edouard Rodel


Le bout du voyage : Bobbio


 
Colomban arrive à Milan en 612, accueilli avec bonté par Aigulf ( Agilulf, Agigulf) et Théodelinde, roi et reine des Lombards, ce qui ne l'empêche pas de réfuter très vite leur arianisme, dans un traité qui a été perdu. Il écrit au Pape Boniface à la demande du Roi des lettres qui passèrent pour favoriser le nestorianisme et qui ont trait à la controverse des "Trois Chapitres". Ces trois chapitres sont ceux de théologiens orientaux suspectés de nestorianisme et la controverse ayant opposé le pape Vigile ( et ses successeurs), qui condamne lesdits chapitres, à une partie de l'épiscopat italien. Les lettres de Colomban témoignent une nouvelle fois du caractère direct et fougueux du moine irlandais. Il est à la fois humble : il demande au pontife d'excuser "l'écossais stupide" qui lui écrit de la part d'un roi, le reconnaît pour chef du monde et de toutes les églises, et franc à la fois : Il met à mal la mémoire du pape Vigilius, déclare que son franc parler est chose commune dans son pays natal et demande au pape de convoquer un concile pour prouver son orthodoxie.
 
Le roi Aigulf donne au moine irlandais une terre entre Milan et Gênes, près de la rivière Trébie (Trebbia), dans un défilé des Appenins : c'est Bobbio, qui sera sa dernière halte. Sur sa route, il apportera la fois au village de Mombrione, qui se changera en San Colombano, nom qu'elle a conservé jusqu'aujourd'hui (2001). A Bobbio, Colomban répare une église Saint Pierre à moitié en ruine et fonde une abbaye qui conservera farouchement son orthodoxie durant des siècles.
 
Colomban fit un voyage à Rome où il aurait recueilli du pape Grégoire de nombreuses reliques. Il y a ainsi, dans la basilique Saint-Pierre de Rome, un lieu traditionnellement choisi pour avoir accueilli la rencontre de Grégoire et de Colomban.
 
L'abbé de Bobbio reçut un jour des messagers de Clothaire, qui l'invitait à regagner la Neustrie puisque ses ennemis étaient morts, mais il préféra rester à Bobbio et demanda au roi de toujours protéger sa communauté de Luxeuil.
 
Puis il se prépara à mourir en se retirant dans une caverne, située au flanc d'une montagne d'où sort la Trébie et où, selon la tradition, il aurait élevée une chapelle dédiée à la Vierge. Il fut enterré dans l'abbatiale de Bobbio et, comme toujours après la mort d'un saint, son intercession fut à l'origine de nombreux récits de miracles. En 1482 ses reliques ont été placées dans un nouveau lieu saint et placées au-dessous de l'autel de la crypte, où ils sont toujours vénérés. L'autel fut restauré en 1907 par le Cardinal Logue. La sacristie à Bobbio possède une partie du crâne du saint, son couteau, la tasse en bois, la cloche et un antique reliquaire, contenant autrefois des reliques sacrées et qui passe pour avoir été donné lui par le pape Grégoire. Selon certains, douze dents du saints ont été prises du tombeau au quinzième siècle et déplacées dans le trésor de l'abbaye, mais celles-ci n'ont pas été retrouvées.
 
Bien que Colomban figure dans la Martyrologie Romaine à la date du 21 novembre, les Bénédictins et les Irlandais le fêtent le 24 novembre.
 
Ses principaux miracles répertoriés sont :

(1) d'avoir nourri un moine malade et guéri la femme d'un bienfaiteur

(2) d'avoir échappé à une meute de loups qui l'encerclait

(3) de s'être fait obéir d'un ours qui a évacué sa tanière à son ordre

(4) d'avoir fait jaillir une fontaine d'eau près de sa caverne

(5) d'avoir rempli le grenier à blé de Luxeuil quand il était vide

(6) d'avoir multiplié du pain et de la bière pour sa communauté

(7) d'avoir guéri des moines malades, qui ont quitté leurs lits à sa demande pour récolter la moisson.

(8) d'avoir rendu la vue à un aveugle d'Orléans

(9) d'avoir détruit par son souffle un chaudron de bière préparé pour un festival païen

(10) d'avoir apprivoisé un ours et de l'avoir attelé pour le labour

Dans les représentations du saint, Columban est souvent représenté barbu, avec la casule monastique. Il peut tenir dans sa main un livre (ou un fouet, dureté de la règle oblige), parfois avec
l'inscription "Christi simus, non nostri",et une crosse. Il peut être debout au milieu des loups.
Parfois il est dépeint en train d'apprivoiser un ours, ou avec des rayons de soleil sur sa tête ou sur sa poitrine.


L'oeuvre


Columbanus nous a laissé plusieurs ouvrages. Il a d'ailleurs étudié jusqu'à la veille même de sa mort. Ses travaux principaux, d'après Migne, P.L. LXXX, sont :

- "Pénitence" qui prescrit des pénitences selon la culpabilité

- Dix-sept Sermons courts

- Six Épîtres

- Poésies latines

- Une Règle Monastique, beaucoup plus synthétique que celle de saint Benoît, en dix chapitres seulement. Six premiers d'entre-eux concernent l'obéissance, le silence, la nourriture, la pauvreté, l'humilité et la chasteté. Le chapitre VII traite des offices. Le chapitre X traite des des pénitences pour diverses infractions et c'est là que la Règle de Columban diffère largement de celle de saint Benoît. La flagellation ou le jeûne sont requis pour les moindres fautes.

Comme chez Benoît, beaucoup de temps était consacré à toutes sortes de travaux manuels. Ceux-ci partagent beaucoup de choses en commun avec la règle Bénédictine, sauf que la question du jeûne est plus développée est stricte chez Colomban. Cette règle était une des vingt-quatre recensées en Irlande à l'époque, beaucoup plus rigides que celle de Benoît , car issues du monde celte, âpre, rigide, combattif. Elle insistait fort sur l'ascèse corporelle, les jeûnes sévères, les fustigations et les séjours dans l'eau glacée pour soumettre le tempérament ardent des moines. Colomban serait sans doute taxé aujourd'hui d'extrêmiste, et ce à juste titre, mais ce fut là, sans doute, la raison principale à la fois de son succès et de son échec : A une époque qui manquait de points d'ancrage, la règle de Colomban proposait aux moines des cadres stricts, une ligne de conduite propre au dépassement de soi. Ainsi, quoiqu'il soit postérieur à Benoît, c'était bien la règle de Columban qui était observée dans les nombreux monastères fondé par l'évangélisateur irlandais, ainsi que ceux dont ils déterminèrent la fondation, particulièrement en Normandie et dans le Nord (la Thérouanne, surtout) et l'Est, correspondant aux grands domaines Mérovingiens, la Neustrie et l'Austrasie : Fontenelle, Jumièges, Annegray, Luxeuil, Remiremont, Lure, Jouarre, Rebais, Lagny, Montier-en-Der, Saint-Etienne-de-Marmoutier*, Haslach, Laon, Hautvillers, Saint-Omer, Saint-Vaast, Saint-Bertin, Saint-Valery-sur- Somme, et bien sûr, nous venons de le voir, Saint-Gall en Suisse, Bobbio en Italie .

La Règle de saint Columban a été approuvé de par le Conseil de Mâcon en 627, mais, comme il l'a été dit ailleurs, elle commença d'être supplantée avant la fin du siècle par celle de Benoît. Pendant plusieurs siècles, et dans certains monastères, les deux règles ont été observées conjointement.
 

* Saint-Etienne-de-Marmoutier : Abbaye d'Alsace fondée par un disciple de Saint Colomban vers 589, peut-être par Saint Léobard. Elle porta alors le nom d'Aquileia, en hommage à une ville de l'Adriatique. C'est l'abbé Maur, au IXe siècle qui la relèvera de la ruine tout en lui donnant son nom (Mauri Monasterium, puis Maursmünster).
* Haslach : Fondée dans le dernier tiers du VIIe s. par un Irlandais, compagnon probable de Columban, saint Florent (+ v. 600), le monastère est d'abord Avellana (ou Avellanum), puis en mémoire de son fondateur, il devient au XIIe s. "monasterium Sancti Florentii ad Haselaha", le monastère Saint-Florent à Haslach, toponyme qui s'explique par le cours d'eau qui borde l'abbaye, la Hasel (Haselbach, Rivolus Hasla). Dès 1216, on distinguera le Haut-Haslach : Hasela superior (latin), Oberhaslach (allemand) du Bas-Haslach : Haselahe inferior, Niederhaslach : où se trouve le monastère devenu collégiale.

 
Sources :
 
 
http://www.newadvent.org (article sur saint Colomban en partie traduite de l'anglais)
http://www.usu.edu/~history/norm/columb~1.htm
http://www.cybercable.tm.fr/~castagno/vie.htm
http://www.orthodox.ch/st-col-1.htm
http://www.kyberco.com/Rotasolis/colomban.htm
http://www.chez.com/oberhaslach/obhahis.htm