ENCYCLOPEDIE -DE--LA--LANGUE -FRANCAISE

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ABEILLE

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LES ABEILLES---
---SOLITAIRES

 

Introduction


 

 
La grande majorité des abeilles (16.000 à 20.000 espèces environ), des abeilles sont solitaires (près de 85% du total) et sont présentes dans toutes les familles existantes d'abeilles (voir taxonomie), des plus primitives (Colletidae, Stenotritidae, Megachilidae, Andrenidae, Melittidae) aux plus sociales (certaines Halictidae (Halictinae), Apidae).

Un grand nombre d'abeilles vivent vraiment de manière solitaire, chaque femelle fabriquant son nid, y déposant la nourriture de ses larves et mourant souvent avant que cette dernière atteigne le stade adulte, ce qui ne permet pas le contact entre les générations.
 
Certaines espèces, cependant, sont dites communautaires ou subsociales quand des femelles nourrissent leur progéniture [Batra (1966) and Michener (1969), Wilson (1971)] et/ou que des individus de même génération utilisent un nid commun abritant les cellules propres à chacune d'elles, où chacune hébergera ses oeufs, larves et pupaes (Megachiles d’Afrique, Michener, 1968)
 
Quelques espèces d'abeilles sont dites parasociales, quand les femelles fondatrices d'un nid coopèrent à la fabrication de celui-ci. D'autres sont appelées semisociales et ébauchent les castes : elles vivent en petites colonies de deux à sept abeilles de même génération, dont une est la reine, ou pondeuse principale, et les autres, ouvrières se répartissent les tâches (polyéthisme, par exemple Halictidae/Halictinae, Pseudaugochloropsis (Michener et Kerfoot, 1967))
 
Un millier d'espèces d'abeilles, environ, vivent en petites colonies comportant une reine et ses filles, quelques ouvrières, dont l'organisation en castes est à peine ébauchée. Appelées primitivement sociales ou eusociales, appelées parfois eusociales inférieures (environ 6% des Apoïdés), ces abeilles forment des colonies provisoires qui se séparent naturellement en automne, seules les reines fertilisées réchappant de l'hiver (exemple : bourdons ( Bombus), Lasioglossum (Halictidae), Euglossines (Apidae/Apinae), abeilles charpentières (Apidae, Xylocopini, etc.). Pour les espèces eusociales, la survie du groupe est primordiale, primant absolument sur celle de l'individu, dont un certain nombre peuvent être sacrifiés dans ce but.

Ces abeilles solitaires ne sont jamais des abeilles hautement sociales, parfois appelées eusociales supérieures (5 % environ) abeilles mellifères appartenant seulement à la famille des Apidae : Mélipones (abeilles sans dard), Bombini (Bourdons) et surtout Apini (genre apis : notre abeille domestique). Ces abeilles sont interdépendantes, leurs reines sont morphologiquement évoluées, avec des colonies stables se formant à partir d'un essaim, divisé en castes avec des milliers d'ouvrières presque toujours stériles (Michener, 1974; Gadagkar 1990).

Cette organisation est présentée ici très schématiquement, car certaines familles peuvent présenter des organisations différentes en son sein, et même certaines espèces, comme Halictus sexcinctus (Fabricius), un Halicte vivant au sud de la Grèce (Daimonia-Pyla) dont les populations comportent des colonies communautaires et eusociales (Richards, von Wettberg, Rutgers, 2003), ou un autre Halicte (Lasioglossum malachurum Kirby) évoluant d'eusocial à semisocial dans la même saison, avec des ouvrières devenant reproductrices de mâles (Agios Nikolaos Monemvasias, Grèce du sud également).

Les abeilles véritablement solitaires ne disposent pas de castes d'ouvrières, chaque femelle construisant son nid, la plupart dans la terre, mais aussi dans le bois, les tiges des plantes, nous le verrons, et nourrissant en une fois leurs larves avant de refermer leurs cellules. Presque toutes butinent nectar et/ou pollen pour leur nichée, et forment ainsi (mais la recette contient aussi de l'acide lactique) ce qu'on appelle un pain d'abeille : larve sur pain d'abeille d'une Andrena (Andrenidae) :

En règle générale, les abeilles solitaires sont protandres : l’émergence des mâles précède celle des femelles, parfois d’environ une quinzaine de jours. La rencontre des partenaires se produit souvent sur les inflorescences visitées : on parle alors de "fleurs rendez-vous"(Alcock et al. 1978).
 
Un grand nombre d'abeilles solitaires nichent dans le sol, souvent en terre (terricoles), parfois de sable (psammophile, du grec psammos, sable et philos, ami), mais certaines sont xylicoles (du grec xulon, bois et du latin colere, vivre, qui vivent dans le bois) ou caulicoles (du latin caulis, tige : qui vivent dans des tiges creuses), spécialement rubicoles (du latin rubus, ronces : qui vivent dans les tiges à moëlle, essentiellement de la famille des ronces, genre Rubus : ronces communes, framboisiers, mûriers, etc...).

Il existe aussi des espèces d'abeilles à part, telles les cleptoparasites (du grec klepto, voler, dérober et parasite, du grec para : à côté, chez, et sitos : nourriture). Le cleptoparasitisme se définit par le fait, pour une espèce, de se nourrir, ainsi que sa dépendance, au dépens d'une autre espèce. On trouve ces abeilles parasites dans les familles Andrenidés, Apidés, Colletidae, Halictidés, Mégachilidés, et elles représentent environ 20 % de l'ensemble des Apoïdés.

 " Les relations hôtes-parasites chez les abeilles

Le terme parasite est souvent utilisé dans différents contextes, et la littérature contemporaine comporte de nombreuses définitions s’appliquant tant à des organismes animaux que végétaux. S’il existe des différences subtiles entre toutes ces définitions, la grande majorité des auteurs s’accordent cependant sur le fait qu’un parasite est un organisme qui vit au dépend d’un autre organisme (son hôte) dont il puise sa nourriture, un abri, ou tout autre élément lui permettant de boucler son cycle biologique (Poulin 2007). Cette définition inclut notamment toute une série de parasites “comportementaux” comme ceux qui exploitent leur(s) hôte(s) par des moyens alternatifs, comme par exemple en exploitant les ressources alimentaires accumulées par leur(s) hôte(s)* (Barnard 1990).
 
*Certaines espèces ne sont pas de véritables parasites mais occupent seulement le nid de leur hôte, sans l'attaquer, sans lui prendre sa nourriture : elles sont dites inquilines.
 
 
Le mode de vie parasitaire implique le plus souvent le développement de toute une série d’adaptations spécifiques et parfois également la perte d’autres caractéristiques comportementales/morphologiques/physiologiques propres aux groupes non-parasites. Chez les abeilles non-parasites (Hymenoptera, Apoidea), les femelles sont dans la plupart des cas équipées d’appareils de récolte de pollen ou autres ressources florales sur leurs pattes, leur thorax, leur tête ou leur abdomen. Chez les espèces parasites, les femelles pondent directement dans le nid de leur(s) hôte(s) [d'où leur nom d'abeilles-coucous, NDE] et on observe presque systématiquement une absence de telles structures morphologiques destinées à la récolte de ressources florales (Westrich 1989; Müller et al. 1997; Michener 2000).
 
Comme c’est le cas chez de nombreux autres groupes d’organismes (p.ex. Ronquist 1994; Goff et al. 1997), le parasitisme est apparu à plusieurs reprises de façon indépendante au cours de l’évolution des abeilles (voir par exemple Michener 1978, 2000; Bogusch et al. 2006; Danforth et al. 2006; Müller 2006). Les abeilles parasites ont généralement un spectre d’hôtes relativement réduit, le plus souvent moins d’une demi-douzaine d’espèces, et les parasites sont régulièrement proches de leurs hôtes d’un point de vue phylogénétique (p.ex. les Sphecodes (Halictidae) parasitent des Halictus et Lasioglossum (Halictidae); les Melecta (Apidae) parasitent des Anthophora (Apidae); les Bombus (Psythirus) (Apidae) parasitent d’autres Bombus (Apidae), etc.).

Ces facteurs importants de l’écologie et de l’évolution des relations parasitaires chez les abeilles intègrent parfaitement le cadre théorique des relations hôtes-parasites, sur lequel il est intéressant de se pencher pour découvrir de nouvelles pistes de recherches pour mieux comprendre la nature et l’évolution de ces relations entre organismes apparentés. A titre d’exemple, Poulin (2007) insiste sur le manque de données disponibles sur la variabilité spatiale et temporelle du spectre d’hôtes de nombreux parasites, ainsi que sur les déterminants et les implications écoéthologiques des relations hôtes-parasites en général."

extrait de : http://homepages.ulb.ac.be/~nvereeck/PDF_OSMIA2/OSMIA_2.pdf

On peut diviser les parasites en deux groupes :
- Les ectoparasites, qui vivent à l'extérieur de leur hôte, accrochés à la surface de leur corps.
- Les endoparasites, qui se développent à l'intérieur du corps de leur hôte, souvent l'intestin, le sang (l'hémolymphe, pour les insectes)


 
larves cleptoparasites de l'abeille sphecodes stygius (Halictidae) posées sur les ailes d'une Hylaeineae (Colletidae).

D'autres d'insectes parasitent aussi des nids d'abeilles solitaires, d'autres hyménoptères et une seule famille de Coléoptères, les Méloïdés (Meloidae, Méloïdes) :
 
"Le Méloïdé américain Meloe franciscanus utilise un subterfuge pour attirer son hôte Des scientifiques californiens ont décrit récemment le comportement très particulier que présentent les larves triongulins [appelées ainsi parce qu'elles possèdent des griffes en forme de trident, NDE], de Meloe franciscanus pour attirer les mâles de leurs abeilles hôtes, des Anthophoridés de l'espèce Habropoda pallida. Lorsqu'elles quittent la galerie sableuse dans laquelle était cachée la ponte, les larves triongulins restent groupées et grimpent sur la tige végétale la plus proche, formant à son extrémité un amas grouillant dont la forme et la position sur la plante ressemblent à celles d'une femelle d'Habropoda :

Amas de larves Meloe franciscanus formant un leurre.

Cet amas de larves [env. 2000 individus, NDE], qui émet certainement une substance volatile mimétique de la phéromone sexuelle de l'abeille, attire les mâles de l'Anthophore. Lorsqu'un mâle tente de s'accoupler avec ce leurre, les triongulins s'accrochent à ses poils et se font transporter jusqu'à ce qu'il s'accouple avec une femelle de son espèce. Les triongulins passent alors sur le corps de la femelle qui les transportera jusqu'à son nid. Un mâle d'Anthophore pouvant s'accoupler avec plusieurs femelles, les larves du Méloé ont ainsi la possibilité de s'introduire dans un grand nombre de nids.


Etude de J. Hafernik et L. Saul-Gershenz, 2000,
Beetle larvae cooperate to mimic bees, Nature,
Vol 405, p35.

extrait de :
http://www.inra.fr/internet/Hebergement/OPIE-Insectes/pdf/i121villemant.pdf

 

sources images :

-http://zoologie.umh.ac.be/hymenoptera/photo_album/08_Colletidae/imagepages/image15.html
(H. sugnatus, photo d'Alain Pauly)
- http://chiron.valdosta.edu/jbpascar/SFLBees/keytofamilies.htm (sphecodes stygius)
- http://www.museums.org.za/bio/insects/beetles/beetle_larvae_mimic.htm (meloe franciscanus)
- http://www.payer.de/mahavamsa/chronik052.htm (timbres)
- http://www.asahi-net.or.jp/~CH2M-NITU/hanabate.htm (timbres)


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