ENCYCLOPEDIE -DE--LA--LANGUE -FRANCAISE
 

-ABEILLE
LES ABEILLES ET LES HOMMES

L'ANTIQUITE ( 3 )
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---La connaissance des abeilles---
document annexe :

VARRON, Re rustica
De l'Agriculture
Extrait du Livre III, ch. XVI


traduction de Désiré Nisard (1806-1888)

1877


extrait du site : http://remacle.org/bloodwolf/erudits/varron/agriculture3.htm


"Écoutez-moi. Je laisse à Mérula le soin d’exposer, avec cette méthode dont il vient de nous donner des preuves, les pratiques observées par tous les meliturges (gens qui font du miel). Les abeilles sont engendrées par d’autres abeilles ou naissent spontanément du corps d’un bœuf en putréfaction. C’est ce qui a fait dire à Archélaüs, dans une de ses épigrammes, « que les mouches à miel sont la génération allée d’un bœuf mort. » Le même auteur dit encore que les guêpes sont engendrées par des chevaux, et les abeilles par des veaux (voir bougonie, NDE). Les abeilles ne vivent point solitaires comme les aigles. A l’exemple de l’homme, elles aiment à se réunir. Les geais en font autant, mais non dans le même but. Les abeilles s’associent pour travailler, pour édifier; chez les geais, rien de semblable. On ne voit point chez eux ces combinaisons d’intelligence, cette adresse d’exécution qui se remarquent dans les constructions des abeilles, et dans leur prévoyance à remplir leurs magasins. Il y a pour les abeilles trois ordres d’occupation: la subsistance, l’édification, et le grand œuvre. Autres soins demandent la préparation du repas et celle de la cire, celle de la cire et celle du miel, la confection du miel et celle de l’alvéole. Chaque cellule d’un rayon a six angles, ce qui fait autant de côtés que l’abeille a de pattes. Remarquons qu’il est démontré par les géomètres qu’un hexagone inscrit dans un cercle y occupe plus de surface qu’un polygone de moins de côtés. Les abeilles vont pâturer au dehors; mais c’est dans l’intérieur de la niche que s’élabore ce doux produit si agréable aux dieux et aux hommes. Le miel trouve place sur les autels aussi bien que sur nos tables, tant au début d’un repas qu’au second service. Les abeilles ont des institutions comme les nôtres, une royauté, un gouvernement, une société organisée. La propreté est de leur essence. Jamais on ne les voit se poser dans le voisinage d’immondices ou d’exhalaisons fétides. Ce n’est pas qu’elles recherchent les parfums : on les voit punir, au contraire, de leur aiguillon quiconque s’approche parfumé de leurs cellules. Elles n’ont point l’indifférente avidité des mouches; aussi ne vont-elles jamais s’abattre, comme celles-ci, sur la viande, le sang ou la graisse. Les aliments d’une saveur douce peuvent seuls les attirer. Incapables de nuire, elles ne goûtent rien de ce qu’elles effleurent en butinant. Timides par nature, elles n’en résistent pas moins à outrance si l’on essaie de les troubler dans leur travail. Elles ont pourtant le sentiment de leur extrême faiblesse. On les appelle favorites des Muses, parce que s’il arrive qu’un essaim se disperse, on n’a qu’à frapper sur des cymbales ou les mains l’une contre l’autre, pour les réunir. Et de même que les hommes ont assigné à ces déesses l’Olympe et l’Hélicon pour leur séjour, de même la nature a abandonné à ces insectes les montagnes incultes et fleuries. Elles suivent leur roi partout, le soutiennent quand il est fatigué, et le portent sur leur dos quand il ne peut plus voler, tant elles attachent de prix à sa conservation.

Elles aiment le travail et détestent les paresseux; aussi les voit-on constamment faire la guerre aux bourdons, et les expulser de leur société; car ils dévorent le miel sans aider à le faire. Souvent même on voit un gros de bourdons fuir devant quelques abeilles qui les poursuivent en murmurant de courroux. Elles bouchent, avec une matière que les Grecs appellent ???????, tous les trous au travers desquels l’air pourrait pénétrer dans leurs rayons. Les abeilles observent la discipline d’une armée, dorment à tour de rôle, répartissent entre elles la besogne, et envoient au loin des espèces de colonies. Elles obéissent à la voix de leur chef, comme les soldats au son de la trompette, et, comme eux, elles ont leurs signes de guerre et de paix. Mais j’ai peur que toute cette physiologie des abeilles ne fatigue notre cher Axius, qui aimerait mieux entendre parler de ce qu’elles rapportent. Je passe donc la lampe à Mérula : à son tour d’entrer en lice. Je ne sais, dit Mérula, si mes notions sur ce point pourront vous satisfaire; mais j’aurai pour autorité un homme que vous connaissez tous, et qui tire tous les ans cinq mille livres de miel de ruches qu’il a louées. J’ai encore notre ami Varron qui m’a dit avoir eu sous ses ordres en Espagne deux frères véiens, tous deux du canton de Falisque, lesquels sont devenus fort riches, bien que leur père ne leur eût laissé qu’une petite ferme d’un arpent au plus; et voici comment. Tout alentour du bâtiment, ils ont placé des ruches, transformé une partie de leur champ en jardin, et planté le reste en thym, cytise et mélisse, cette plante que les uns appellent µe??f????? (feuille à miel), les autres µe??ss?f????? (feuille aux abeilles), et d’autres encore µ??????. Grâce à ces dispositions, ils ne retiraient jamais moins de dix mille sesterces par an de leur miel. Remarquez cependant qu’ils attendaient pour le vendre un moment favorable, et n’étaient jamais pressés de s’en défaire coûte que coûte. Eh bien ! s’écria Axius, enseignez-moi où je dois placer des ruches, et quels soins il faut leur donner pour en tirer d’aussi beaux produits. Mérula répondit : Quant aux ruches (µe??tt??e?), que les uns appellent µe??tt?t??fe?a, les autres mellaria, elles doivent être placées près de la métairie, dans un lieu sans écho; car l’opinion générale est que cet effet du son effarouche les abeilles. Il leur faut un lieu assez élevé, qui ne soit ni brûlé pendant l’été, ni privé de soleil pendant l’hiver; pâture abondante dans le voisinage, et de l’eau pure. Si la nature n’y a pourvu, le propriétaire aura soin de faire venir à proximité des ruches les plantes que les abeilles recherchent le plus, comme la rose, le serpolet, la mélisse, le pavot, les fèves, les lentilles, les pois, la dragée, le sauchet, le sainfoin, et surtout le cytise, qui convient tant aux abeilles malades. Cette plante a encore l’avantage de fleurir depuis l’équinoxe du printemps jusqu’à celui d’automne. Autant le cytise leur est précieux sous le rapport sanitaire, autant le thym l’est pour la préparation du miel. Si le miel de Sicile a la palme, il la doit à l’abondance et à l’excellente qualité du thym que produit cette île. Aussi quelques personnes vont-elles jusqu’à arroser les pépinières plantées à l’usage des abeilles, de thym broyé et détrempé dans de l’eau tiède. Quant à l’emplacement des ruches, il faut le choisir le plus rapproché possible de la villa. Quelques-uns, pour plus de sûreté, les mettent sous le portique même. Les ruches sont de forme circulaire. On en fait d’osier quand on en a, de bois, d’écorce, de troncs d’arbres creusés ou de poterie; d’autres les font carrées avec de la férule, et leur donnent environ trois pieds de long sur un pied de large. Il faut toutefois en restreindre les dimensions, si l’on n’a pas assez d’abeilles pour les remplir; car trop d’espace vide les décourage. On a donné aux ruches le nom d’alvus (ventre), du mot alimonium (nourriture); c’est pourquoi on les fait étroites par le milieu, et renflées par le bas pour figurer un ventre. Les ruches d’osier doivent être enduites en dedans et en dehors avec de la bouse de vache, pour faire disparaître leurs aspérités, qui rebuteraient les abeilles. On les assujettit par rangs le long des murs, de façon qu’il n’y ait pas d’adhérence entre elles, et qu’elles soient à l’abri de toute secousse. La même distance qui sépare le premier rang du second doit régner entre le second et le troisième. Au lieu d’en ajouter un quatrième, on fera mieux, dit-on, de s’en tenir aux deux premiers. On pratique au milieu de chaque ruche de petits trous de droite et de gauche, pour que les abeilles puissent entrer et sortir; et on y pose un couvercle qu’on peut lever à volonté, lorsqu’on veut en retirer le miel. Les ruches en écorces sont les meilleures. Celles en terre cuite sont les moins bonnes, parce qu’elles sont plus accessibles au froid en hiver et à la chaleur en été. Le mellarius, c’est-à-dire celui qui est chargé du soin des ruches, doit les visiter trois fois par mois, au printemps et en été, y pratiquer de légères fumigations, les purger d’immondices, et en chasser les vermisseaux. Il veillera soigneusement à ce qu’il n’y ait pas plusieurs rois dans une même ruche; car cette pluralité cause des séditions, et le travail languit. Selon quelques auteurs, les chefs sont de trois couleurs, noire, rouge et mélangée; Ménécrate n’en admet que deux, le noir et le mélangé. Comme le mélangé est sous tous les rapports préférable au noir, il faut que le mellarius tue celui-ci toutes les fois qu’il se rencontre avec l’autre dans une même ruche. Cette royauté double, source de factions, est la perte d’une ruche; car il en résulte l’expulsion ou l’émigration d’une partie des abeilles, lorsqu’un prétendant triomphe ou se voit chassé. Parmi les abeilles, on regarde comme les meilleures celles qui sont petites, rondes et bigarrées. Le bourdon (fur) qu’on appelle aussi fucus est noir, et large de ventre. Il y a une autre espèce d’abeille qui ressemble à la guêpe; elle ne s’associe point aux travaux des abeilles ordinaires, et leur nuit au contraire par ses morsures; aussi celles-ci l’expulsent-elles toujours de leur communauté. Il faut distinguer les abeilles sauvages des abeilles privées. Les premières séjournent dans les bois et les lieux incultes, les autres dans les champs cultivés. Les abeilles sauvages sont velues et petites, mais plus laborieuses que les abeilles privées. En achetant de ces insectes, on doit s’assurer s’ils ne sont point malades. C’est un signe de bonne santé lorsque les essaims sont denses, les mouches luisantes, et qu’il y a dans leur travail précision et netteté. C’est un signe de maladie lorsque les abeilles sont velues, hérissées, poudreuses, à moins toutefois qu’elles ne soient alors pressées de travail, ce qui peut leur donner cette apparence négligée et malingre. Quand on juge à propos de transférer les ruches, il faut mettre une grande circonspection dans le choix du lieu et du moment. Pour le moment, le printemps est préférable à l’hiver car dans la saison froide les abeilles ont peine à s’habituer aux changements de demeure, et sont disposées à déserter. C’est ce qui arrive certainement, si d’un lieu qui leur convient vous les transportez dans un autre moins propice à leur pâture.

Le changement de ruche sans changement de place exige encore certaines précautions. On frotte par exemple les nouvelles ruches de mélisse, ce qui est pour les abeilles un grand appât, et dans chacune on place près de l’ouverture quelques rayons de miel; cette provision toute faite leur donne le change sur leur translation. La nourriture qu’elles trouvent au commencement du printemps, dans les fleurs d’amandier et de cornouiller, les rend presque toujours malades: on les guérit avec de l’urine. On appelle propolis la matière dont se servent les abeilles, surtout en été, pour boucher l’ouverture de leur ruche. C’est la même substance que les médecins emploient pour les emplâtres. Aussi se vend-elle dans la rue Sacrée plus cher que le miel même. On appelle érithace celle qui colle les rayons ensemble, et qui est essentiellement distincte du miel et du propolis; on lui suppose une vertu attractive. Quand on veut, par exemple, qu’un essaim se fixe sur une branche d’arbre ou ailleurs, on n’a qu’à frotter la place avec de l’érithace mêlée de mélisse. Les rayons sont un composé de cire, à plusieurs compartiments, dont chacun a autant de côtés que la nature a donné de pattes à l’abeille, c’est-à-dire six.

Ce n’est pas indistinctement de toutes plantes que les abeilles recueillent de quoi composer ces quatre différentes substances, propolis, érithace, rayon et miel. Telle ne fournit, comme la grenade et l’asperge, que la nourriture; ou, comme l’olivier, que la cire; ou, comme le figuier, que du miel, lequel est assez médiocre. Telle autre, comme les fèves, la mélisse, la courge et le chou, contiennent deux éléments, nourriture et cire; ou, comme le pommier et le poirier sauvages, miel et nourriture; ou, comme le pavot, cire et miel. D’autres enfin réunissent les trois principes élémentaires, de la cire, du miel et de la nourriture, comme l’amandier et le chou sauvage. Il y a aussi un grand nombre de fleurs sur lesquelles elles recueillent tantôt une seule, tantôt plusieurs de ces substances. On doit établir une distinction entre les plantes dont elles font un miel liquide, comme la bruyère, et celles dont elles font un miel épais, comme le romarin. Le miel du figuier est insipide; le miel du cytise vaut mieux; mais le meilleur de tous provient du thym. Comme elles ne se désaltèrent que dans l’eau la plus pure, il faut qu’elles trouvent dans le voisinage de leurs ruches un petit courant ou un réservoir, où l’eau n’ait pas plus de deux ou trois doigts de profondeur. On y jettera de petits cailloux ou des briques, formant au-dessus de l’eau des points où les abeilles puissent se poser pour boire. On doit veiller avec soin à ce que l’eau soit toujours très claire, ce qui influe singulièrement sur la qualité du miel. Comme l’essaim ne peut sortir par tous les temps pour butiner, il faut qu’il trouve dans ce cas la nourriture tout à portée, de peur que, réduites à ne vivre que de leur miel, les abeilles ne mettent à sec la ruche. A cet effet on fait bouillir dans six congii d’eau dix livres de figues; et de la pâte qui en résulte on pétrit des espèces de gâteaux qu’on place auprès des ruches. Certaines personnes y mettent aussi de petits vases remplis d’eau emmiellée, sur chacun desquels surnage un morceau de laine de la plus grande propreté: par ce moyen les abeilles peuvent en quelque sorte sucer l’eau, et ne risquent ni d’en trop boire ni de se noyer. Il doit y avoir un vase pour chaque ruche, et on les remplit à mesure qu’ils se vident. D’autres broient dans un mortier des raisins secs et des figues, et versent du vin réduit aux deux tiers par la cuisson. Du résidu ils font ensuite de petits pâtés qu’ils jettent non loin des ruches, de façon que les abeilles les trouvent sur leur passage dans leurs excursions au dehors. Quand une émigration se prépare (ce qui arrive quand un grand nombre de naissances étant venues à bien, les anciennes de la ruche veulent envoyer la génération nouvelle en colonie, ainsi que les Sabins par l’accroissement de leur population furent souvent obligés de le faire), cette résolution s’annonce par deux signes précurseurs. D’abord, quelques jours avant, on voit surtout le soir, près de l’ouverture de la ruche, des groupes d’abeilles accrochées les unes aux autres par pelotons, et formant comme autant de grappes; ou bien encore, sur le point de s’envoler, et quand a déjà commencé le mouvement de retraite, elles font entendre une rumeur extraordinaire, comme d’une armée qui lève le camp. Les plus promptes voltigent autour de la ruche, attendant que les autres, qui ne se sont pas encore rassemblées, les rejoignent. Quand le mellarius aperçoit ce symptôme, il n’a qu’à jeter sur les abeilles de la poussière, et à frapper en même temps sur quelque instrument de cuivre, pour répandre l’effroi parmi elles. Il pourra ensuite les conduire où bon lui semblera, en ayant soin de placer aux lieux de leur destination nouvelle une branche d’arbre ou tout autre objet frotté d’érithace, de mélisse, et enfin de tout ce qui attire les abeilles. Quand il a réussi à les arrêter, il y place une ruche frottée intérieurement des mêmes substances, et, entourant les abeilles d’une légère fumigation, il les oblige à y entrer. Une fois qu’elle y a pris pied, la nouvelle colonie y fixe si bien son domicile, qu’en vain l’on rapprocherait d’elle la ruche qu’elle vient de quitter, c’est la nouvelle qu’elle préfère. Voilà tout ce que je crois avoir à dire de l’éducation des abeilles. Passons au but principal de leur entretien, qui est le profit qu’on en retire. On enlève les rayons lorsque les ruches sont pleines. Les abeilles font elles-mêmes connaître ce moment. On a lieu de présumer qu’il est venu lorsqu’on entend un bourdonnement dans les ruches, et qu’on voit les abeilles se trémousser en entrant et en sortant; ou bien encore lorsqu’en ôtant le couvercle, on voit les cellules couvertes comme d’une pellicule de miel, signe qu’elles sont entièrement remplies. Il y en a qui prétendent qu’en enlevant le miel on doit en laisser dans la ruche la dixième partie, et que si l’on enlève tout, les abeilles désertent. Quelques-uns même en laissent davantage. Il en est des abeilles comme des terres: on augmente le rapport d’un champ en le laissant se reposer de temps à autre; on augmente celui des abeilles, et en même temps on les attache davantage à leur ruche, en y laissant la totalité ou du moins la plus grande partie du miel. On enlève les rayons pour la première fois au lever des Pléiades; pour la seconde fois, à la fin de l’été, avant que l’Arcture soit entièrement levée; et pour la troisième, après le coucher des Pléiades. A cette dernière époque on ne doit jamais ôter plus du tiers du miel, quand même la ruche serait pleine; les deux autres tiers y resteront comme provision d’hiver. Quand la ruche n’est que médiocrement fournie, la levée du miel ne doit se faire ni d’un seul coup, ni en présence des abeilles, afin de ne pas les décourager. Si dans les rayons qu’on enlève, il se trouve une portion qui soit vide de miel ou tant soit peu endommagée, il faudra la retrancher avec le couteau. Il faut veiller avec soin à ce que parmi les abeilles les plus fortes n’oppriment pas les plus faibles, ce qui amènerait une diminution notable dans le rapport des ruches. On choisit en conséquence les moins vigoureuses, pour les soumettre à un autre roi. Lorsqu’on s’aperçoit qu’elles se battent souvent entre elles, il faut les asperger avec de l’eau mêlée de miel: aussitôt tout cesse, et les combattants se pressent les uns contre les autres pour sucer le liquide. L’effet de ce moyen est encore plus sensible quand, au lieu d’eau, c’est du vin mêlé de miel que vous répandez sur les abeilles. Attirées alors par l’odeur du vin, elles se recherchent avec plus d’empressement, et s’enivrent en le suçant. Quand les abeilles se montrent paresseuses à sortir, et restent dans les ruches en trop grand nombre, il faut avoir recours aux fumigations, et placer dans leur voisinage quelques herbes odoriférantes, surtout de la mélisse et du thym. Les plus grands soins sont indispensables pour les empêcher de périr de l’excès du froid ou de la chaleur. Lorsqu’en butinant elles viennent à être surprises par une averse ou par un froid subit, ce qui est rare toutefois, et qu’abattues par les grosses gouttes d’eau, elles sont jetées à terre privées de force et de mouvement, il faut les ramasser, et les mettre, dans un vase qu’on placera dans un lieu couvert où règne une chaleur douce, et les y tenir jusqu’à ce que le temps soit bien assuré. On répand alors sur elles de la cendre de bois de figuier, chaude plutôt que tiède; puis on secoue légèrement le vase, sans toucher les abeilles, et on l’expose au soleil. Lorsqu’elles sentent la chaleur, elles se remettent et reprennent vie, comme des mouches qui ont été submergées. Il faut leur appliquer ce traitement non loin des ruches, pour qu’elles puissent y retourner dès qu’elles seront revenues à elles, et reprendre leur ouvrage avec une force nouvelle."