ENCYCLOPEDIE -DE--LA--LANGUE -FRANCAISE
 

-ABEILLE

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LES ABEILLES ET LES HOMMES

croyances,
savoirs
et
apiculture


----APICULTURE TRADITIONNELLE----
et PATRIMOINE---

L'AMÉRIQUE PRÉCOLOMBIENNE
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( II )


1Abeille du codex de Madrid, reproduction (voir pages du codex, ci-dessous)
 

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Codex de Madrid,
page 104
 
 
Dans la partie supérieure de la page, le dieu Itzamná représente la saison sèche, séparant les deux corps de la ruche.
 
Dans la partie centrale, à gauche, la reine de la ruche, Balan Cab (ou Balam Cab, balam : jaguar, cab : abeille). Au centre, le dieu de la pluie Chac (Chaac) se saisit des jobones.
Au-dessus de la troisième abeille, à partir de la gauche, on peut voir le glyphe du dieu lune Yak Balam ("Nouveau Jaguar), qui est un des avatars du grand héros du Poppol-Vuh, Xbalanqué, le divin jumeau de Hun Ahpu (Hun Ahaw, Hun Ahau, Hunaphu : "Premier Seigneur") : voir page suivante.
 
Dans la partie inférieure, le premier dieu, Itzamná, retire le miel des rayons (melarios). La seconde divinité Ha Mucen Cab, sous la forme de Yum Kax, récolte du miel d'un nid d'abeilles sans aiguillon.

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Codex de Madrid,
page 105
 
 
 
 
Dans le cadre central, des offrandes sont faites aux dieux le développement des essaims.
Le cadre inférieur présente deux ruches sous les glyphes. Celle de gauche est la ruche-mère, et celle de droite, la ruche-fille. Remarquez que la première apparaît comme plus physiogastrique que la seconde. L'iguane, sous la ruche-mère, représente Itzamná, sur un récipient et symbolise ici la fertilité masculine. Les os disposés en croix qui apparaissent sous la ruche-fille sont un symbole du dieu de la Mort, Ah Puch.

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Codex de Madrid,
page 106
 
 
 
 
Dans le cadre supérieur, le dieu créateur Hunab Ku, avec la connaissance de Kukulcan, soutient des mains l'entrée de la ruche-mère symbolisée par une expression du glyphe Imix
5, le premier jour du mois du calendrier Tzolkin.
Les cadres inférieur traite des dates d'essaimage, celles qui conviennent le mieux à la division des colonies.

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Codex de Madrid,
page 107
 
 
 
 
Ici, sont décrits divers rituels d'offrandes aux dieux de Création et de Fertilité de la cire noire appelée cerumen, symbolisée par une spirale posée sur les vases liturgiques. cette spirale n'est autre qu'une expression du glyphe Cib, le 16e jour du mois du calendrier Tzolkin, qui signifie cerumen : 7. Dans le cadre de la méliponiculture, le cerumen désigne la cire noire (cera negra) obtenue par les mélipones par un mélange de cire et de propolis brune dont elles se servent pour bâtir leurs "pots" de miel.

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Codex de Madrid,
page 108
 
 
Les deux parties supérieures nous tournent encore autour du cerumen. En haut, il est le résultat de la croissance de la colonie. Au milieu, à droite, il est dévoré par la Grande Abeille Rouge, qui vient de l'Orient, un autre avatar d'Ah Mucan Cab. Toujours dans la partie supérieure, on peut voir que la seconde abeille, reine de la ruche ou Balam Cab, est décapitée.
C'est que la colonie est devenue orpheline et qu'elle est ainsi condamnée à mourir. Dans la partie inférieure, on peut voir le transfert d'un essaim à partir d'un tronc d'arbre, divisé en deux colonies, si l'on se fie aux deux parties que comptent la ruche visible.
 
 
 


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Codex de Madrid,
page 109
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Codex de Madrid,
page 110
 Dans la partie supérieure de la page 110, sont figurées des abeilles épousant la forme de Muzencabob qui sont en même temps des Bacabes, qui indiquent quatre points cardinaux apicoles : La première abeille est le Bacab du Nord et indiquent aux abeilles la direction de la propolis. La seconde est le Bacab de l'Est et indique le lieu d'où vient le miel (ce qui donne à penser que les indigènes d'Amérique ne savaient pas non plus que les abeilles fabriquaient le miel). Ajoutons que, pour cette raison, les ruches étaient tournées vers l'Est. La troisième, le Bacab du Sud, indique le lieu où les abeilles peuvent collecter le pollen. Enfin, la quatrième abeille est le Bacab de l'Ouest, qui indique le lieu d'où vient la progéniture : c'est pour cela qu'est figurée la tête du dieu Créateur ( J.P. Cappas e Sousa , 1996).

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Codex de Madrid,
page 111
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Codex de Madrid,
page 112
 Dans la partie supérieure de la page 111, on peut voir deux ruches divisées en deux cadres. Celui de la partie supérieure comprend le nid (caban) et celui de la partie inférieure le cadre pour le miel (cauac). Le personnage de gauche est Ah Mucen cab, non seulement, une nouvelle fois, sous sa forme du dieu du maïs Yum Kax, mais en portant dans son glyphe nominal le nom de Sac Xaman Ex, la Blanche Étoile du Nord (voir page précédente). Le dieu ouvre la ruche avec un grand couteau. A sa droite, en partie effacé, le dieu Chaac, le dieu de la pluie (équivalent du Tlaloc aztèque), ferme la ruche à l'aide d'un instrument apicole, ce qui indique que les abeilles bouchent le couvercle de la ruche quand il pleut (Cappas J.P. 1998).
 
Dans la partie médiane, on observe encore Ah Mucen Cab/Yum Kax apportant le savoir de Kukulcan à une Balam Cab, une reine de la ruche, représentant la fertilité et la vitalité du nid des abeilles : Il semble là, que les Mayas connaissaient le sexe de la Reine bien avant les Européens !
 
La partie inférieure serait consacrée à l'élaboration de la boisson rituelle appelée balché (voir page précédente)
 
La partie inférieure de la page 112 montre le renouvellement de la reine de la ruche et la destruction de celles qui ne sont plus viables.
 
 
 
 
Le Codex Mendoza (Códice Mendocino, Colleccion Mendoza)
 
 

Ce codex a été commandé par le vice-roi Antonio de Mendoza qui voulait l'offrir à Charles Quint. Seulement, à son retour vers l'Espagne, le manuscrit tomba entre les mains de pirates qui s'en emparèrent et le revendirent. Il fut acheté par André Thévet, moine Cordelier puis Franciscain, explorateur et cosmographe, avant de le revendre à un historien anglais. Le codex compte parmi les collections de la Bodleian Library d'Oxford depuis 1654. Il a été exécuté vers 1542 sur le modèle d'un ouvrage préhispanique, le Codex Moctezuma (ou Matrícula de tributos : Liste des Tributs), conservé au Musée National Anthropologique de Mexico et probablement réalisé pendant les dernières années de règne de Moctezuma II (ou Montezuma II, 1480 - 1520) par pas moins de six scribes-peintres (tlacuiloque, sing. tlacuilo, aussi tlahcuiloani) différents , dont un seul (peut-être Francisco Gualpuyogualcal), celui qui réalisa les folios 6r à 11v, serait l'auteur unique du Codex Mendoza environ vingt ans plus tard, selon Juan José Batalla Rosado, du Département d'Histoire de l'Amérique, section anthropologie, à Madrid.

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 Page 7 du Codex Moctezuma, annoté postérieurement par les Espagnols.

16 feuillets (32 folios) de 29 x 42 sur papier amatl


On retrouve la liste des tributs du codex préhispanique dans la seconde partie du codex Mendoza, des folios 17v à 55r, qui illustrent le détail et le compte des biens (produits, denrées, hommes (guerriers) ou animaux) dus au titre de tribut à l'Empire Aztèque par ses 38 provinces (Cobo, 1653; Roubik, 2000), la première partie étant consacrée à la conquête de l'Empire par les Mexicas menés par les Seigneurs de Tenochtitlán, de 1325 à 1521, et la troisième à la société : naissance, éducation, mariage, armée, métiers, etc.
Nous présentons ici les folios concernant le miel, qui faisait partie de ces impôts :

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Codex Mendoza

14. folio 36r, tribut de la province de Tlachco. On peut voir deux rangées de cinq jarres de miel. Le petit drapeau (pantli) indique une quantité de 20. C'est donc 200 jarres (ici : cantarillos. En nahuatl : ollascomitl, tzotzocolli) que la province devra livrer.
On distinguait le miel d'abeilles avec d'autres "miels", qui le plus souvent des jus ou des sirops sucrés de plantes ou d'animaux : miel de maguey (Agave americana) surtout (voir image ci-dessous), ou encore miel de canne à sucre ou miels de fourmis (miellats, en réalité, du genre Myrmecocystus ou Melophorus), mais aussi du vrai miel de certaines guêpes mellifères : voir ABEILLES - DU NECTAR AU MIEL
"miel" de maguey, détail du folio 27, tribu de la province d'Axtocopan. La plume représente une quantité de cinquante (abrégé en ciq, pour ciquante : ciq. cantaros de miel de maguey...)

15. folio 40 r, tributs des provinces de Tlalcoçauhtitlan, Quiauhteopan et Yoaltepec. S'agissant de l'impôt en miel, ces provinces sont à égalité, avec 5 x 20 = 100 jarres : le texte espagnol dit bien "cient ou c. (pour cientos) cantaricos de miel de abejas.
 
 

 

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