ENCYCLOPEDIE -DE--LA--LANGUE -FRANCAISE
ABEILLE

APIDAE

---Les tribus hautement sociales, APINI---

Le GENRE APIS

---APIS MELLIFERA---

( V )

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--L'OUVRIÈRE--

( 2 )
-
L



 
Bâtisseuse : 8e - 23e jour environ (moyenne : à partir du 15e jour)
 


Les glandes nourricières se tarissent, les glandes productrices de cire, les glandes cirières se développent. L'ouvrière construit alors le nid avec la cire qu'elle produit surtout à partir du nectar, à cause de sa teneur en sucres, mais aussi du pollen, dont elle tire des lipides, qu'elle accumule dans son abdomen avant le début des travaux (Sept kilos de miel pour un kilo de cire, besoins moyen de la construction d'une ruche). La cire est exsudée des plis profonds et chitineux situés sur la face inférieure des quatre derniers segments de leur abdomen (sternite, opposée à tergite, sur la face dorsale). Dans chacun des plis se trouvent deux miroirs à cire ou plaques cirières, dont les cellules graisseuses assurent la sécrétion de la cire, qui sort en plaques très fines qui se détachent d'elles-mêmes. Elles sont alors recueillies par les brosses des pattes, au niveau de la troisième paire et sont portées à la bouche où leurs mandibules les malaxent avec de la salive (pour partie, des enzymes) pour les mettre en boule. La cire fraîche est de couleur blanchâtre
(images 1 à 3). C'est le pigment de propolis et les agents colorants du pollen (variant selon les fleurs butinées) qui donne aux rayons cette jolie couleur jaune.
 

 Ouvrières bâtissant les cellules de leur nid

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 Abeilles insatisfaites des alvéoles préfabriquées, en plastique, et construisant des cellules perpendiculaires au cadre.

   On voit ici très bien que l'occupation des cellules n'attend pas la fin des travaux.
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 Chaîne cirière d'abeilles bâtisseuses. Bâtisseuse en train de travailler à la construction d'une alvéole au moyen de des pattes antérieures.    


C'est peut-être la tâche de l'abeille la moins planifiée. En effet, la colonie ne semble pas avoir des lois bien établies sur cette question. Une seule abeille peut faire avancer d'un coup la construction, mais, une autre fois, elle peut déposer sa boule de cire qui est piquée par une collègue qui termine une autre cellule. Les abeilles travaillent souvent côte à côte, en étirant la cire de haut en bas, mais elles peuvent aussi former de véritables chaînes, ou grappes
(image 4), qui pendent de la ruche et réalisent un acheminement constant de matière première aux abeilles qui maçonnent les cellules. En moyenne, il faut compter six heures de travail à une centaine d'ouvrières pour bâtir une cellule.

La ruche


Les abeilles sont des architectes économes. Non seulement elles parviennent à étirer la cire au maximum (d'un kilo de cire environ, elles bâtissent 80.000 cellules), mais de plus, elles créent un nid d'une structure parfaite, qui contient très peu d'espace vide, en forme de rayon, une plaque de cire contenant des cellules hexagonales, les alvéoles. Ces cellules partagent chacun de ses côtés avec une autre cellule, ce que ne pourrait autoriser des alvéoles d'une autre forme et qui sont inclinées de 13° vers le haut pour empêcher l'écoulement du miel et d'autres produits qui y sont emmagasinés. De plus, les architectes réussissent l'exploit de construire une structure solide, alors que les parois des cellules ne dépassent pas 8/100e de mm d'épaisseur !
Les cellules des ruches servent soit de nurserie, soit de cellier. Celles du premier groupe accueillent, nous l'avons vu, le couvain. Les plus grandes alvéoles (6,2 à 6,4 mm), sont destinées aux mâles, souvent situées au bord des rayons. Les plus petites (5,2 à 5,4 mm) sont à l'usage des ouvrières, les reines bénéficiant de cellules un peu plus grandes que ces dernières, en très petit nombre (deux dizaines au maximum) qui pendent généralement en bas ou sur le côté du rayon et qui sont construites lors de l'essaimage ou de la supercédure. Près du couvain, les ouvrières ont entreposés du pollen pour faciliter la tâche des nourrices, les autres cellules nourricières recevant les réserves de miel de la colonie, situées généralement en partie haute de la ruche. Les cellules sont utilisables plusieurs fois après un nettoyage complet et, le cas échéant, réparation.


Nettoyeuse-Receveuse, Magasinière, Ventileuse : 10e jour mini - 18e jour maxi, environ

 Nettoyeuse-Receveuse

       
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 Transmission de nectar par trophallaxie entre une butineuse et une receveuse.    Abeille nettoyeuse sortant après désoperculation un cadavre momifié (anglais : mummie) d'une larve atteinte de la maladie du "couvain plâtré" appelé aussi couvain calcifié ou dur : ascophérose (en anglais : chalkbrood "couvain crayeux"), maladie due à un champignon, Ascosphaera apis.    Abeilles magasinières, stockant le pollen. Remarquez la cellule, en haut à droite, où les pelotes de pollen ont été jetées et attendent d'être malaxées et tassées, comme dans les autres alvéoles.


Les glandes cirières s'atrophiant, l'ouvrière change une nouvelle fois de job. Cette fois, après avoir encore fait un grand ménage de la ruche, déchets divers de cire, de pollen, cadavres de larves ou d'adultes, elle reçoit les butineuses à deux ou trois, et tout ce petit monde communique par les antennes (voir Anatomie, Tête, Antennes), et leurs parties buccales. La bouche de la receveuse reçoit de la butineuse nectar ou pollen (déjà augmenté par la butineuse : voir page suivante), échanges de nourriture appelés trophallaxie, nous en verrons d'autres. Les abeilles receveuses sont appelées magasinières, déchargeuses (food-storers, en anglais). Le pollen qu'elles reçoivent est ensalivé et aggloméré dans les alvéoles de la ruche. Il y subit des transformations enzymatiques et fermente pendant une dizaine de jours, au bout desquels est obtenu ce qu'on nomme le pain d'abeilles, emmagasiné dans des cellules appropriées de la ruche, pour la nourriture des larves, nous l'avons évoqué précédemment.
 
Quant au nectar, les receveuses ouvrent plusieurs fois leurs pattes pour l'aérer, afin de lui ôter beaucoup d'humidité. Elles le recrachent ensuite dans une alvéole et elles le déshydratent d'avantage avec leurs ailes, pour que le produit obtenu ne contienne pas plus de 18 % d'humidité : c'est ainsi que le nectar est devenu miel. Les cellules contenant des réserves de nourriture sont généralement placées à la périphérie de la ruche.

 Ventileuse

(vers le 18e jour)

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     Abeille en train de ventiler à l'entrée de la ruche    Un groupe de ventileuses en action, reconnaissables à leur position, typique, face à la ruche, et au mouvement rapide de leurs ailes.    "Barbe" formée par les abeilles pour abaisser la température de la ruche.


On sait depuis longtemps que certaines abeilles sont spécialisées dans la ventilation du nid, qui se divise en trois tâches principales de régulation : Celle de la température du nid, celle de son taux d'humidité et celle qui équilibre le taux d'oxyde de carbone (Huber 1814; Chadrick 1922; Buedel1, 1968; Lindauer 1954,1971; Simpson 1961).
 
Quand l'ouvrière sort enfin du nid, mais ce n'est pas pour musarder comme Maya, mais encore pour rendre service et se transforme en climatiseur volant. En été, elle se place souvent à l'entrée du nid (trou de vol ?) ou sur les rayons du couvain et secouent leurs ailes pour que l'air chaud sorte de la ruche et que l'atmosphère de la ruche diminue par l'évaporation de l'eau, qui hydrate les cellules images 7 et 8, Bruman,1928; Gary, 1978). Les récolteuses et les butineuses qui rapportent à la ruche de l'eau ou du nectar dilué sont accueillies à pattes ouvertes, tandis que celles chargées d'un nectar de pure qualité, donc concentré, attendent un moment que la température du nid ait baissé à un niveau suffisant. Les ventileuses déposent l'eau aux endroits chauds du nid pour qu'elle puisse, par évaporation, le refroidir (Frisch, 1967; Lindauer, l97l). Elles peuvent, avec leurs ailes, activer ce processus si le refroidissement est urgent.
 
Si la température est intenable, d'autres abeilles cessent leurs activités pour prêter main-forte aux ventileuses et s'agglutinent en grappe (qu'on appelle barbe) devant l'entrée de la ruche pour la rafraîchir au mieux (image 9). En hiver, au contraire, ou au début du printemps, le problème est de chauffer la ruche, en particulier du côté de la nurserie (couvain), où une température cocoonesque de 30-36° (moyenne de 34/35°) doit être maintenue pour élever les bouts de chou de manière convenable, ce que font les abeilles avec leurs muscles alaires, sans remuer leurs ailes. A des températures très basses (au dessous de - 18°), elles font comme les manchots, se tenant agglutinés pour limiter la déperdition de chaleur et permutant leurs places de temps en temps depuis le centre (d'une petite dizaine de degrés chez l'abeille) jusqu'à la périphérie (environ 8°, température au dessous de laquelle une abeille meurt).
 
En plus de la chaleur et de l'humidité, les abeilles contrôlent par la ventilation la teneur en gaz carbonique des gazs respiratoires qui peut être élevée dans le nid (Hazelhoff,1941, 1954; Lacher,1967; Seeley 1974), et qui doit demeurer entre 0,1 et 0,4 % de l'air ambiant. C'est l'antenne de l'abeille qui est sensible à ce taux de dioxine de carbone et qui lui permet d'adapter son comportement de régulation.

 Gardienne et apprentie butineuse, 12e jour mini- 25e jour maxi environ (moyenne 18e - 21e jour)

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 Gardiennes en activité

10. Contrôles d'identité

11. Flagrant délit, refus d'obtempérer de la part d'une abeille étrangère à la colonie.



Dans une position défensive, où elle dresse tête et pattes antérieures, les gardiennes se postent à l'entrée de la ruche et réclament les pièces d'identité de celles et ceux qui veulent pénétrer dans la ruche. Pour les ennemis, c'est simple, la vue suffit à apprécier le danger : guêpes, fourmis, frelons, etc… on les chasse et on les pique.
Pour distinguer les abeilles de la ruche des clandestines d'un autre nid, c'est un peu plus compliqué. Les moins malignes sont repérées immédiatement par leur attitude, un balancement d'avant en arrière, qui leur permet de foncer dans la ruche dès qu'une gardienne a le dos tourné. Les autres ne peuvent malheureusement pas changer leur odeur caractéristique, et doivent se soumettre au contrôle douanier : Toutes les abeilles doivent se pencher, s'immobiliser pour être contrôlées par les antennes d'une gardienne
(image 10). La carte d'identité recherchée précise l'odeur de l'abeille, qui dépend à la fois de la génétique de la société d'origine de l'individu, mais aussi de la nourriture de la ruche, dont le corps des abeilles est imprégné. Les individus d'une même colonie ont une odeur caractéristique. La gardienne admet alors le passage de ses frères et sœurs, mais aussi des butineuses étrangères, chargées de bon nectar ou de pollen. En cas d'insoumission, c'est la sanction immédiate, on ne badine pas chez les abeilles, et on est traité comme un vil ennemi (image 11). A ce moment là, l'abeille se sert de son appareil à venin, dit appareil vulnérant.

Quand son emploi de gardienne lui laisse un peu de temps libre, l'ouvrière commence à voler à quelque distance de la ruche, quand le temps le permet, beau et calme, plutôt au milieu de la journée. Au fur et à mesure de ses voyages, l'abeille s'éloigne de plus en plus et de plus en plus longtemps, jusqu'à 1 kilomètre de distance de la ruche (l'équivalent de 1000 km pour un être humain). Mais d'abord, elle commence par profiter de l'aubaine en balançant dans la nature le paquet d'excréments qu'elle a accumulé au début de sa vie. Mais ce n'est pas parce qu'elle est encore plus légère que l'abeille pense à batifoler, sûrement pas. Elle va consacrer son temps libre en étudiante modèle et va se lancer dans des disciplines aussi difficiles que le repérage topographique, la connaissance de l'environnement, l'apprentissage des formes, des couleurs et des odeurs.

 

sources texte et images :

- http://www.culturaapicola.com.ar/apuntes/genetica/182_control_social_ventilacion_colonias.pdf
- http://whyfiles.org/shorties/238bee_diversity/images/herbees.jpg (cire fraîche)
- http://www.hive-mind.com/bee/blog/2007_05_01_archive.html (alvéoles plastique)
- http://beekeeperlinda.blogspot.com/2007/04/stages-as-honey-becomes-ready-for.html (ventilation)
- http://beespotter.mste.uiuc.edu/topics/ccd/799px-Honeybee-cooling_cropped.jpg (ventileuse)
- http://canariesinacoalmine.blogspot.com/2008_06_01_archive.html (ventileuses)
- http://www.perspectivaciudadana.com/images/080419/abejas1.jpg (chaîne cirière)
- http://www.ars.usda.gov/is/pr/2005/050110.htm?pf=1 (momie)
- http://www.berniesbeebuzz.com/album.html (gardiennes)
- http://earthobservatory.nasa.gov/Features/Bees/bees3.php (abeille couverte de pollen)
- http://www.beecare.com/images/Bees/lets-dance.jpg (stockage pollen)
- http://www.biology-blog.com/blogs/permalinks/11-2006/genes-brain-chemicals.html (construction alvéole)
 

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