ENCYCLOPEDIE -DE--LA--LANGUE -FRANCAISE

- ----------------- ABBAYE------------------
  --Le temps des Carolingiens


 

Saint Augustin (354-430), De Doctrina christiana, manuscrit de l'abbaye de Saint-Riquier (Somme), vers 800 (entre 789-814) avec dédicace d’Angilbert, abbé de Saint-Riquier à l’empereur Louis le Pieux. Paris, BnF.

Introduction
Les invasions

Architecture

 

Saint Jérôme traduit la Bible en latin,
(première Bible de Charles le Chauve, Paris, BNF, lat. 1, f° 3v°)

 


Introduction


A partir du milieu du VIIIe siècle, succédant aux mérovingiens, s'impose la dynastie carolingienne. Le territoire constituant la Lorraine actuelle faisait donc partie d'un immense empire allant de Barcelone à l'Est de l'actuelle Allemagne. Metz et sa région sont toujours le cœur de l'empire, l'abbaye St Arnould (détruite plus tard) servant de nécropole à d'éminents membres de la famille carolingienne. Pour le diriger, les Carolingiens s'appuient sur de grands personnages issus de l'aristocratie. Concernant notre sujet, l'exemple le plus intéressant est celui de Chrodegang, évêque de Metz, qui avait été élevé à Sint-Truiden (Saint-Trond)*, dans la province belge de Limbourg, près de Tongres (Tongeren). Il est un personnage très important de l'Etat, proche conseiller des Carolingiens et sans doute chef implicite de l'Eglise pour tout l'empire. Chrodegang met au point une liturgie unifiée, avec des chants, que l'on verra plus en détail dans un chapitre particulier. Un des successeurs au siège épiscopal de Metz n'est autre qu'un bâtard de Charlemagne, Drogon, ce qui montre l'importance de Metz dans la politique carolingienne.

* Trond est né dans une riche famille de la Hesbaye (Belgique actuelle) liée aux Carolingiens. Il fut le disciple de Remacle et de Clou, et fonda sur ses terres le monastère Saint-Quentin-Saint-Rémi qui, après sa mort, le 23 novembre 695, devint Saint-Trond.

C'est une époque décisive pour les abbayes, qui seront 400 à être érigées entre 768 et 855. Participant à la domination féodale depuis le milieu du VIIe siècle, nous l'avons vu, l'abbaye est depuis lors une véritable seigneurie, vassale d'un suzerain, mais suzeraine en son rang, possédant elle-même des vassaux et des serfs, des hommes d'armes et des officiers militaires, judiciaires et civils, qui tiennent en fief leur office. lle guerroie par son avoué, qui commande sa milice et la représente partout où l'usage des armes est nécessaire, elle bat monnaie, elle exerce toutes les juridictions, exige toutes les redevances et jouit de tous les privilèges attachés à la possession de la terre féodale. Les abbés font partie du plaid (assemblée des hommes libres), qui ne rassembleront progressivement que les Grands du royaume.


Non seulement l'abbaye cumule ce qui appartient au seigneur avec ce qui revient à l'église, mais elle y ajoute de grands profits, provenant du travail de ses serfs et de ses moines, d'une culture et d'une industrie opérant sur ses terres, dans des conditions de sécurité, d'indépendance et de suite qui ne se trouvaient point ailleurs. Cependant, la cour Carolingienne, itinérante, choisira de plus en plus de séjourner dans les monastères comme invités de marque, ce qui accroîtra parfois lourdement les charges de ces couvents.
 
 
L'empire Carolingien s'étend grosso modo, selon le moment, de la Catalogne à la Bohême, et pourtant, les centres monastiques vitaux continuent, comme pour les Mérovingiens, de se situer principalement au Nord ou à l'Est, dans les différentes contrées dont sont issus les membres de ces dynasties. Ainsi, de grands établissements monastiques déjà constitués se fortifient, par la grâce des princes essentiellement, par leur statut privilégié d'abbaye royale, par exemple, mais aussi, de nouvelles fondations viennent renforcer ce maillage.
 
Dès avant la naissance de la dynastie Carolingienne, il revient à Charles-Martel de développer, pour la première fois à grande échelle, la vassalité et le bénéfice (ou chasement), pris sur des terres fiscales (le fisc désigne alors le domaine royal) ou des terres de l'Eglise. L'immensité des biens ecclésiastiques détermina une grande confiscation du prince au bénéfice à vie de ses leudes, profitant des guerres pour chasser les religieux et s'emparer de tous leurs biens. Charles est pourtant le premier d'entre-tous, un princeps, qui doit protection (tuitio) aux églises, aux couvents. Mais quelle protection! Non content de spolier les biens ecclésiastiques, il va se servir de l'épiscopat et de l'abbatiat pour ses visées politiques. Pour obtenir un soutien de l'Église franque, il s'emploie à remplacer évêques ou abbés qui font montre d'une quelconque inimitié, surtout en Neustrie. Il met à leur place des hommes qui lui sont fidèles.
 
Par exemple, il met la main sur la principauté épiscopale d'Auxerre dont il confisque les biens qu'il redistribue entre six princes bavarois proches des Pippinides. Son neveu Hugues (fils de Drogon), par exemple, cumule les abbatiats de Saint-Denis, Saint-Wandrille (où l'abbé Waddon est démis de sa charge) et Saint-Vaast, mais aussi les évêchés de Paris, Bayeux, Lisieux, Avranches, et Rouen, où Charles démet Waddon de sa charge abbatiale, à l'abbaye de Fontenelle, la future Saint-Wandrille. Le prince exile à Cologne Eucher d'Orléans (+738/743), moine de Jumièges vers 714, évêque d'Orléans, sa ville natale, en 721, avant de l'interner à Saint-Trond (Sint-Truiden), dans la province belge de Limbourg, près de Tongres (Tongeren). Dernier exemple, l'abbaye de Nantes se voit confiée au comte Agathée, celle de Corbie à Grimo, ambassadeur de la famille Pépinnide auprès du Saint Siège.

Ses successeurs ne feront pas autrement : En 790, par exemple, Charlemagne confie à son gendre, Angilbert, l'abbaye Saint-Riquier, qui lui donne dès lors un large essor. Adalhard (751-826), cousin de l'empereur, fait de même avec la prestigieuse abbaye de Corbie, où Paschase Radbert écrira en 831 le premier traité théologique consacré à l’Eucharistie. Adalhard abandonne finalement le siècle et y devient abbé. L’activité missionnaire de l’abbaye est grande. Elle essaime notamment à Corvey (ou Corwey, en Westphalie), qu'Adalhard fondera avec son frère Wala et d’où rayonnera l’évangélisation vers l’Europe du Nord.

Mais ces spoliations étaient exposées à l'excommunication et ne pouvaient se faire qu'en un temps où l'Eglise se trouvait momentanément impuissante contre les gens de guerre. Rappelons à cette occasion que le roi Eudes d'Aquitaine, face à la menace des Musulmans, fit appel à Charles Martel en 732 pour arrêter les pillages des Sarrasins qui voulaient s’emparer du trésor de Saint-Martin de Tours, le plus riche monastère de la Gaule. Charles Martel s'emparera finalement de l'Aquitaine, puis de la Bourgogne. En 733, il y lance une première offensive, pour laquelle il rallie, moyennant des postes stratégiques, le soutien de quelques grands aristocrates de la région. Parmi eux se trouve Abbon, patrice, recteur de Maurienne et de Suse. Abbon est alors fait patrice de Provence et bénéficie de nombreux biens confisqués à cette occasion. Nous parlons de lui ici car il est le fondateur du monastère de Novalaise en 726, que les Carolingiens prendront sous leur protection et qui reçut un important patrimoine le long de la route de la Maurienne et du val de Suse.
 
Dès que la situation s'améliora, on mitigea le procédé, on agit moins par force qu'à l'aide de la peur : on promit de défendre l'abbaye, on la respecta et on garda les moines, mais on prit le titre et les émoluments de l'abbé, tout en restant homme d'épée : Ainsi, à la tête des comtés, domaines divisés du royaume, le comte devient abbas-miles (abbé-chevalier) ou abbas-comes (abbécomte ou abbacomite). Le système des comtés (ou pagi) se généralisant, de nombreux comtes cumulent des honneurs (honores), dont l'abbatiat n'est pas le moins rémunérateur des comitatus (partie du produit des amendes, des impôts, des terres publiques concédées, etc...). Ce nouveau comte s'appelle abbé-comte (ou abbécomte) ou abbacomite. L'abbacomite verra sa charge devenir de plus en plus héréditaire, permettant à son groupe de parenté de contrôler durablement de grandes régions, surtout à partir de la seconde moitié du IXe siècle : Ainsi celui des Heribert-Thierri et ses Eudes, contrôlant les comtés et les abbatiats laïques du Nord de la Seine.
 
En parallèle, il est vrai que les princes carolingiens favorisent la fondation de monastères, développent le culte des saints et l'élévation des reliques. Ce culte prend alors des proportions considérables, orienté vers les saints martyrs, dont la translation des reliques en Gaule (de Rome, en particulier), est facilitée. De plus, ils assurent l'immunité à de nombreux domaines de l'Eglise : Par cette immunité, il est interdit aux comtes de pénétrer et d'agir sur le domaine de l'abbaye qui détient alors les pouvoirs de justice de police ou militaire (levée de troupes, par exemple). Ces seigneuries ecclésiastiques détiennent dans ce cas l'ensemble des coutumes de la seigneurie banale :
- Consuetudines , c'est-à-dire l'exercice de la puissance politique, la justice civile et criminelle.
- Tonlieux (taxes de circulation sur les marchandises, comme les péages)
- Districtio, le droit de surveiller et de contraindre.
- Dîme, qui est généralisée. C'est le dixième des récoltes (montant réclamé dans la Bible) et des revenus est dû aux seigneurs ayant fondé une église sur leur domaine, qu'ils soient laïcs, clercs ou moines.
 
Les Carolingiens ont fait pourtant des efforts pour protéger les faibles des oppressions des puissants : comtes, abbés, évêques, vassaux royaux, et veulent établir une meilleure justice. Les deux textes suivants nous donnent un écho de cette pseudo-justice, où les abbayes représentent tour à tour victimes et oppresseurs :
 
"Les mécanismes judiciaires, fondés sur la contestation, l'enquête, le jugement et les serments, apparaissent bien à travers l'affaire de Mettlach : le monastère, fondé au début du VIIIe siècle par l'évêque de Trèves Léoduin, avait été concédé en bénéfice par Charles Martel au widonide Milon, puis donné à l'église de Trèves par Léoduin. Après la mort de l'évêque Milon, fils de Léoduin, son parent Lambert avait envahi le monastère et s'en était emparé par force. Un grave litige (une contentio) éclate alors entre le missus Wicbert et les fils de Lambert qui "contestent" (1a contradictio) les droits de l'église de Trèves, en prétendant qu'ils tenaient cet alleu (pleine propriété) de leur père. Charlemagne réunit le tribunal royal à Thionville et comme les trois frères n'ont pas été en mesure de présenter les témoins attestant la légitimité de leur possession, Charles fait droit à l'église de Trèves. Les trois frères doivent se présenter devant lui, prêter serment de respecter le jugement et remettre le monastère à l'archevêque de Trèves. La mise en ordre judiciaire a permis aux églises de recourir plus efficacement à la justice royale en intentant des procès contre les laïcs. La procédure d'enquête préalable, surtout en matière d'homicide, peut être ouverte avant tout dépôt de plainte. Le système de preuve reste celui qu'il était à l'époque mérovingienne : l'une des parties, le plus souvent l'accusé, doit prouver sa bonne foi, par le serment purgatoire avec des co-jureurs, par la preuve testimoniale (des témoins choisis par les parties témoignent sous serment), par des documents écrits attestant de son bon droit. On peut avoir recours au jugement de Dieu, par l'ordalie (épreuve de l'eau bouillante, du fer rouge ou de la croix) ou par le duel judiciaire".

Extrait d'"Histoire de la France, origines et premier essor, 480 -1180, par Régine le Jan, parue chez Hachette, 1996)

 
"Nous voulons connaître les devoirs des ecclésiastiques, afin de ne leur demander que ce qui est permis, et qu'ils ne nous demandent que ce que nous devons accorder. Nous les prions de nous expliquer nettement ce qu'ils appellent quitter le monde, et en quoi l'on peut distinguer ceux qui le quittent de ceux qui y demeurent; si c'est seulement en ce qu'ils ne portent point les armes et ne sont pas mariés publiquement: si celui-là a quitté le monde qui ne cesse tous les jours d'augmenter ses biens par toutes sortes de moyens, en promettant le paradis et menaçant de l'enfer, et employant le nom de Dieu ou de quelque saint pour persuader aux simples de se dépouiller de leurs biens, et en priver leurs héritiers légitimes, qui par là, réduits à la pauvreté, se croient ensuite les crimes permis, comme le larcin et le pillage; si c'est avoir quitté le monde que de suivre la passion d'acquérir jusqu'à corrompre par argent de faux témoins pour avoir le bien d'autrui, et de chercher des avoués et des prévôts cruels, intéressés, et sans crainte de Dieu."

 
Extrait d'un capitulaire de Charlemagne, daté de 811
Capit. interrog., p. 478, t. VII; Conc., p.1184.
 

Quant à la réforme des monastères ( mais aussi celle du clergé et des chapitres), elle commencera de s'opérer au cours des divers conciles réunis par Chrodegang de Metz (env. 712-766, appelé aussi Godegrand, Gundigran, Ratgang, Rodigang, Sirigang). Cette réforme sera reprise plus tard par Charlemagne dans l’Admonitio generalis (l'Exhortation générale) de 789 et elle aboutira à une réforme quasi-définitive (du moins sur le papier) de la vie monastique en occident, celle de Benoît d'Aniane, entreprise de 809 à 817.
 
C'est à l'occasion de ses réformes que les textes font apparaître un souci de catégoriser les formes de vie chrétienne. Le mot "ordo", que nous traduisons maladroitement par ordre, est employé alors pour parler des formes de vie qu'adoptent les différents chrétiens. Ainsi, "ordo monasticus", "ordo canonicum" et "ordo solitarium" ne sont pas des ordres (ordines) au sens constitutionnel du terme, organisés ou hiérarchisés, non, mais désignent plutôt des modes de vie religieuse différents : monastique, canoniale ou érémitique. A côté d'eux se placent les ordres des laïcs et des clercs.
 
Enfin, évoquons ici le principe de la pluralité des bénéfices et de la commende, qui permit à un grand nombre de riches de le devenir encore plus et qui prit sa vitesse de croisière au temps des Carolingiens.

* "chevalier du christ", titre conféré à Louis le Pieux par Raban Maur, abbé de Fulda, dans un recueil de poèmes dédié à ce souverain : De laudibus sanctae crucis.

 
 
 
Les invasions
 

C'est un temps de calamité pour tous les sujets de l'Empire d'Occident, bien sûr, que représentent les invasions normandes et, dans une moindre mesure, sarrasines ou hongroises.
 
Les temps sont très difficiles, nous ne pouvons en douter, mais prenons garde de ne pas trop coller à l'histoire romantique qu'on a composée sur ceux qui ont été appelés Vikings ou Normands, cette dernière appellation collant plus près à la réalité, puisqu'ils se nomment eux-mêmes Nord-manni, hommes du Nord, en majorité Danois. De sérieux historiens sont même sur des pistes étonnantes : Le rôle important qu'ils auraient joué dans le commerce aurait peut-être dynamisé la paysannerie...Cela ne fera de toute manière pas oublier la longue liste de rapines qu'on leur attribue de manière indiscutable. Cependant, si ces derniers ont bien pillé les monastères, ils ne les ont pas rasés. Les couvents des villes les plus touchées par les invasions (Paris, Rouen, Nantes) n'ont pas disparu après eux. Si quelques moines trouvent la mort, la plupart des moines fuient, emportant leurs livres ou leurs reliques à l'abri. La plupart trouvent un refuge, comme ceux de Montier-en-Der, dans les Ardennes, qui fuient les Normands jusqu'à Vienne-en-Dauphiné, ou encore ceux de Saint-Martin de Tours, qui se réfugient dans le Berry. Parfois, certains abandonnent l'idéal monastique : C'est ce qui arriva aux moines de Montier-en-Der qui, regagnant finalement leur monastère, se partagèrent les biens, en même temps qu'ils eurent femmes et enfants. Par ailleurs, on est surpris, à la lecture des diplômes royaux, de constater la volonté des communautés monastiques à lutter contre l'adversité : Les moines demandent et obtiennent souvent du roi réparation pour les dégâts causés dans leurs couvents (Les moines de Saint-Denis se voient octroyer la villa de Marnay dans le comté de Morvois). Ils font renouveler les diplômes perdus dans les incendies, réorganiser la gestion domaniale en rédigeant un polyptique (abbaye de Prüm en 893), bâtir castra ou castella pour mettre leurs couvents à l'abri, comme à Saint-Bertin ou Saint-Vaast.

Tout ce qui vient d'être dit ne doit pas cacher non plus la féroce réalité représentée par la venue des guerriers scandinaves. Ils voyagent à bord d'embarcations* longues et étroites, rapides et légères, à voile ou/et à rames, qui leur permettent des attaques éclair à partir des rivages ou le long des cours d'eau qu'ils remontent. Sur le continent, elles débutent un peu avant la mort de Charlemagne, aux environs de 810, et villes et abbayes sont particulièrement exposées aux violences des envahisseurs. En effet, c'est là que se concentre la richesse convoitée lors de leurs pillages. Non seulement les clercs et les moines ont à subir leurs pillages, mais aussi de lourds tributs (danegeld) que les Vikings réclament dès 841, car les domaines de l'Eglise payent l'essentiel de ces lourdes charges (on en connaît une dizaine s'élevant à plusieurs milliers de livres d'argent !). Les Sarrasins, quant à eux parviennent en Provence dès 840 et, après de nombreux raids alpestres, réussissent à capturer Maïeul, abbé de Cluny. La cavalerie hongroise, enfin, débarque en Pannonie à la fin du IXe siècle et d'étapes en étapes parvient au cœur de la Francie en 919, terrorisant les régions rurales et les monastères isolés.
 
Les moines (mais aussi bien d'autres, clercs ou laïcs) protègent alors saints, reliques, livres, etc... et un intense va-et-vient s'opère au gré des apparitions et des disparitions des envahisseurs, dont voici un petit aperçu, exemples pris parmi les plus connus :
 
793 Ce serait l'année des toutes premières razzias Vikings et elles ont lieu d'abord le long des côtes de Northumbrie, où les Normands pillent l'abbaye de Lindisfarne et passent les moines par l'épée, renversant la croix de pierre d'Ethelwold, mettant la main sur tous les trésors, incendiant les bâtiments, abattant le bétail, traînant les cadavres des animaux à bord et, enfin, disparaissant aussi rapidement qu'ils sont apparus. Attaque ratée de Wearmouth-Jarrow une année après et pillage de l'abbaye de l'île d'Iona.
836 Translation des reliques de Saint Philibert de l'abbaye de Noirmoutier à Déas (Saint Philibert de Grandlieu).
841 Des Vikings sont sur la Meuse et le Rhin. Ils pillent alors les riches abbayes de Saint Guen dont les moines réussissent à sauver les reliques, brûlent l'abbaye de Jumièges. Les îles sont fortement visées, et nous citerons l'île de Ré dont son abbaye Notre-Dame est brûlée.
845 Pillage de l'abbaye de Saint-Germain (Saint-Germain-des-Prés), précipitamment vidé de ses reliques par les moines.
849 Les Normands saccagent l'abbaye de Paunat, dans le Périgord. Dix des moines conduits par leur abbé Adalgasius fuient et fondent l'abbaye de Vabres, sur des terres données par le comte de Toulouse Raymond Ier.
852 Incendie de l'abbaye Saint-Wandrille (Fontenelle). En 858 les moines partent avec les reliques des saints sur le chemin de l’exil : Ponthieu et Boulonnais, Gand en 944).
858 Les Vikings capturent Louis, abbé de Saint-Denis et grand chancelier de Charles le Chauve, et son demi-frère Gozlin, futur évêque de Paris, qui seront relâchés contre une énorme rançon.
860, Les Normands détruisent Saint Martial de Paunat, en Périgord.
865, 879, 897 Les Normands incendient et pillent l'abbaye de Fleury.
866. L'abbaye de Saint Denis est occupée par les Vikings. Comme ils reçoivent un tribut (4000 livres et du vin), ils s'en vont.
872 Devant les Normands, les Chanoines de l'Abbaye de Saint-Martin-de-Tours translatent les reliques de saint Martin à Auxerre.
881 L'abbaye d'Elnon (Saint-Amand-les-Eaux) est complètement détruite et les envahisseurs massacrent les moines restés pour la garder.
883 Les Sarrasins envahissent le monastère du Mont-Cassin, le saccagent et le mettent à feu. L'abbé Berthaire, fondateur de la ville médiévale de Cassin, y trouve la mort.
887 Selon Hugues de Flavigny, les Vikings assiègent Flavigny du 11 au 25 janvier.
921 Franchissant la plaine du Pô et le col du Grand Saint-Bernard, les Sarrasins détruisent le monastère de Saint-Pierre près de Bourg-Saint-Pierre, dans le val d’Entremont (Suisse). Plus d’une fois, ils attaquent l'abbaye de Saint-Maurice d’Agaune, dans le Valais suisse.
926 L'Occident commence à subir les terribles invasions hongroises. Certains monastères sont durement touchés, comme ceux de Corbie en Picardie, Haumont, dans le Hainaut (Belgique) ou Saint-Gall (Suisse).
936 En une nouvelle vague suisse, les Sarrasins pillent Disentis et menacent Saint-Gall trois ans après.
954 Les Hongrois, appelés par Conrad, le frère du roi de Germanie Otton Ier, assiègent Metz et Gorze, en Lotharingie, sauvées dit-on par l'intervention miraculeuse de saint Gorgon.
955 Les Hongrois détruisent le monastère de Benediktbeuern, à 60 km de Münich, qui sera reconstruit par l'évêque d'Augsbourg, Ulrich, qui avait grandi à l'abbaye de Saint-Gall. Le roi de Germanie Othon Ier les vaincra définitivement à Lechfeld la même année.
1003 Les Sarrasins pillent l'abbaye de Lérins

* embarcations vikings : Il nous a paru bon ici de parler de l'utilisation abusive du mot "drakkar", pour désigner le bateau viking utilisé lors de leurs raids maritimes du IXe au XIe siècles. Ce mot n'existe dans aucune langue scandinave et vous le chercherez vainement dans les musées consacrés aux hommes du Nord dans leurs propres pays. Ce mot aurait été forgé dans la seconde partie du XIXe siècle et Régis Boyer dans "La vie quotidienne des Vikings"(Hachette, 1992) nous donne des éléments d'explication : "(...) la figure de proue : par métonymie, elle servait souvent à dénommer le bateau tout entier. Donc : le Bison, le Bélier, le Serpent, la Grue, etc., selon l'animal plus ou moins stylisé qui était sculpté à l'étrave."
S'il est vrai que la figure la plus représentée était surtout un dragon, dreki en vieux norois, pluriel drekar, les bateaux utilisés lors des raids maritimes du IXe au XIe siècles étaient plutôt des langskip (littéralement "bateau long"), alors que les snekja (on trouve aussi snekkar, skeid : serpent, transcrit en français par "esnèque") étaient particulièrement utilisés dans les batailles navales et les knör° (knörr, knarr), gros bateau à la puissante étrave, serviront lors des expéditions sur les côtes du Groenland et du "Vinland".
 
Cette vague d'invasion accélèrera la désintégration des empires et le morcellement des pouvoirs en principautés : nous analyserons en quoi ceci regarde notre sujet au chapitre : LLe temps des mutations, fin IXe et Xe siècles.
 
 

 

 

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