ENCYCLOPEDIE -DE--LA--LANGUE -FRANCAISE

ABBAYE
 

---------Art Mérovingien

   
 
Enluminure
6e partie
 
--Evangiles de Chad-



 
L'essentiel de ce chapitre a été composé sur la base de notre traduction de la page web :
http://www.florin.ms/aleph4.html
 

 
 
 
Ouverture de l'évangile de Luc
Folio 71r
 
"Page tapis", avec le symbole de la croix
 

 

Détail du précédent, à l'intersection des branches de la croix.

 
 
 

 
 
Les évangiles de Lichfield, connus aussi sous le nom des évangiles de saint Chad, sont une oeuvre insulaires ou Hiberno-saxonne, écrit en semi-onciale. Il a été composé autour de 700-730, d'un texte basé sur la Vulgate, reproduisant les évangiles de Matthieu, de Marc et d'une partie de l'évangile de Luc. Le manuscrit retrouvé faisait partie d'un ensemble de deux volumes, qui demeurait à Lichfield depuis le X siècle au moins, à l'exception d'une brève période de guerre civile anglaise. Selon Wendy Stein, on a en tout lieu de penser qu'il fait partie, comme les évangiles de Lindisfarne, de l'école active de Northumbrie, qui a donné la grande partie des manuscrits insulaires qui nous sont parvenus de l'époque mérovingienne. Cependant, on peut y trouver des parentés avec les évangiles de Saint Gall et le livre de Kells (the Book of Kells), ce qui n'emprêche pas les spécialistes de penser que nous avons à faire à un manuscrit autochtone, produit dans un monastère de Mercie (Mercia), sans avoir aucune certitude, pourtant, quant à sa provenance précise.

Les évangiles de Lichfield sont un livre d'autel de luxe typique , qui occupe une place bien connue dans la tradition Hiberno-saxone, comme le sont les évangiles de Lindisfarne, mais aussi le livre de Durrow (vers 670) ou le Livre de Kells (vers 800 ), les Evangiles de saint Gall (fin VIIIe siècle), ou encore les Evangiles d'Echternach (vers700) , le Livre d' Armagh (801) et les Evangiles MacRegol (début IXe), sans parler des Evangiles Hereford (un peu plus tardif que ceux de Lichfield, d'Ouest Mercie) et le fragment de Worcester (au plus tard VIIIe siècle).

Il n'y a aucun colophon, mais le texte est le travail d'une seule main, sur une seule colonne (deux à Lindisfarne) et est basé sur la Vulgate, nous l'avons dit, dont la comparaison (selon Jenkins et Owen) permet de trouver près de deux mille différences, dont plus d'un tiers se retrouvent dans les évangiles d'Hereford, un autre nombre considérable se trouvant la comparaison, toujours de la Vulgate, avec le MacRegol et les évangiles d'Armagh, 370 avec le Livre de Kells et seulement 62 avec Lindisfarne. Le texte du volume retrouvé cesse au verset 9 du chapitre 3 de l'évangile de Luc et cela suggère qu'un deuxième volume ait été perdu. 236 folios ont survécu, dont 8 sont finement décorés. Il est donc évident que le manuscrit reste incomplet. Les pages décorées comportent les pages initiales de trois Évangiles, l'élaboration de Matthieu 1.18, les portraits de deux des évangélistes, Marc et Luc et, associés à l'Évangile de Luc, la croix ou "page tapis" , ainsi que la page avec les quatre symboles des évangélistes.

La majuscule insulaire fut une invention de l'Irlande et s'est étendue à Lindisfarne vers le VIe-VIIe siècles. Le manuscrit de Lichfield présente en plus quelques formes d'onciales appelées, nous l'avons signalé, "semi-onciales", forme aussi utilisée au Pays de galles au VIIe sècle, point non négligeable, nous le verrons plus loin, mais aussi dans les manuscrits de Northumbrie, d'Iona, d'Irlande, cette communauté de formes établissant un lien patent entre toutes ces communautés monastiques, nonobstant le fait que chacune d'entre-elles conservent des marques indéniables d'originalité dans leurs propres factures.

Les huit pages enluminées aident à donner une place au manuscrit de Lichfield dans la tradition Hiberno-saxone. Généralement, on parle de ce dernier en soulignant les similitudes qui le rapproche de ceux de Kells, de Saint-Gall, de MacRegol ou d'Hereford, mais un examen détaillé suggère un rapprochement subtil avec celui de Lindisfarne. Dans ce dernier, les quatre symboles associés aux évangélistes sont introduits séparément dans chacun des Évangiles, et sont réunis autour d'une croix, comme ils le sont à la fois pour les manuscrits de Lichfield, de Durrow et de Kells. Ce dernier n'a pas moins de cinq pages de ce type, une associé à chaque Évangile et une liée à l'évangile de Matthieu, très parente de celle de Lichfield. Cette page commune, souvent mentionnée comme "page tapis", est une particularité commune à de ce groupe de manuscrits. La croix carrée du Lichfield (voir illustration en en-tête) est entrelacée avec des oiseaux et des chiens au-dessous des bras de la croix et de nouveau des chiens au-dessus des mêmes bras. La page est, de façon saisissante, semblable à deux autres faisant partie du manuscrit de Lindisfarne, en particulier celle se référant à Matthieu.

 
A noter qu'il y a plusieurs inscriptions dans les marges du manuscrit (appelées "marginalia"), dont certaines font partie des plus vieilles mentions en gallois que l'on connaisse, et qui s'échelonnent dans le temps entre le IX e et le Xe siècles, et dont les auteurs portent des pseudonymes, attribués par les spécialistes : de Chad 1 à Chad 8. Le Chad 2, en particulier, serait quant à lui un exemple unique de première écriture de prose galloise.

Du point de vue de sa provenance, le Chad est un manuscrit des le plus intéressants. Il y est précisé qu'un certain Gelhi a acheté l'Évangile à Cingal, pour le prix de son meilleur cheval, et ensuite "pour son âme, il en fit don à Dieu lui-même, sur l'autel de saint Teilo". Bien que cet autel ait été très tôt associé à Llandaff, on pense aujourd'hui qu'il fait référence à Llandeilo Fawr. Le Lans dont fait référence le Chad est associé à des lieux à moins de 15 milles de Llandeilo.

L'histoire postérieure des évangiles de Lichfield est plus lisible. La signature, s'est effacée, mais toujours perceptible, de l'évêque Wynsy (972-992) sur un folio s'ouvrant sur le fait que le manuscrit était à Lichfield au Xe siècle. On y trouve une référence à l'évêque Leofric (1020-1026) sur le folio 4 et le titre "Textus evangelii sci Cedde", de même sur le folio 1, daté du XIIIe siècle. Un manuscrit remarquable, dit le Rouleau du Sacristain, daté de 1345, qui dresse une liste de trésors, dont les "deux livres les plus antiques appelés les livres du Chad béni", qui se réfèrent aux deux volumes originaux dont nous avons parlé, et dont il nous reste un seul aujourd'hui .
 
Pendant la Guerre civile en Angleterre, la Cathédrale de Lichfield subit trois sièges, le dernier, de 1646, ayant été fatal à la bibliothèque, pillée et dispersée, bien que, s'agissant du manuscrit qui nous occupe, on dit que son maître de chapelle, Higgins, les sauva et qu'ils ont été rendus à Lichfield, par la Duchesse de Somerset, en 1672 ou 1673, avec une inscription touchante. La voici :
"Ce livre des plus sacrés, qui a été caché à l'abri, comme la Loi de Moïse a été cachée dans l'Arche de l'Alliance, était un jour le trésor et le plaisir d'une dame très célèbre, Frances, Duchesse de Somerset … qui a donné ce joyau (en comparaison duquel l'or est commun) parmi mille autres volumes, à sa bien-aimée Eglise de la Cathédrale de Lichfield, toujours chère à sa mémoire, et pour la plus grande gloire de Dieu et l'enrichissement de littérature.

 
Sources :
 
 
 
 
http://www.enluminure.com/technique.htm
http://www-brestecoles.enst-bretagne.fr/4moulins/documentaires/archives/archives.htm (lectionnaire luxeuil)
http://www.medieval.unimelb.edu.au/ductus/demo/Files/ductus/frames/scripts/D-024.html (moralia)
http://www.newadvent.org/cathen/06357a.htm (rite gallican)
http://www.a2points.com/homepage/orthodoxie/Sources.htm (rite gallican2)
http://www.wsp.krakow.pl/kbin/bofdurrow.html (images durrow 1 2)
http://www.scoileanna.com/~derekd/bookdurr.htm
http://www.artehistoria.com/historia/obras/ (lion , aigle de durrow)
http://rubens.anu.edu.au/htdocs/bytype/manuscripts/survey/0000/7.JPG (durrow)
http://www.wisc.edu/arth/ah201/30.barbarian.3.html
http://www.chez.com/bibliophile/definition.html
http://faculty.luther.edu/~martinka/art43/daily/2nd/lind1.jpg ( couverture évangéliaire Lindisfarne)
http://www.bl.uk/diglib/treasures/lindisfarne.html (images manuscrits)
http://cedar.evansville.edu/~ecoleweb/glossary/lindisfarne.html
http://www.florin.ms/aleph4.html (incipit de Luc, évangéliaire de Lindisfarne)
http://web.uccs.edu/~history/index/Bede.htm
http://www.faksimile.ch/werk40_f.htm (évangile de Cuthbert)
http://faculty.luther.edu (images évangile de Cuthbert)
http://pages.ancientsites.com/~Lucius_Aelius/lindisfarne/stonyhurst.html
Stonyhurst- cuthbert gospel (folio)
http://faculty.cua.edu/pennington/Paleography/ParisBiblNat9389-116r.htm ( évangiles d'Echternach, folio116r)
http://www.wsp.krakow.pl/whk/echter1.html (evangiles d'Echternach, folio 31)
http://www.ceu.hu/medstud/manual/MMM/incipit1.html (evangiles d'Echternach, folio 177)
http://www.rarebooks.ie/history.htm (Histoire du Cathach)
http://www.ria.ie/library/cathach.html (Histoire du Cathach)
http://www.eskimo.com/~hmiller/cumdach/cathach.jpg (dos du Cathach)
http://ccat.sas.upenn.edu/jod/Picts/cathach.shrine.jpg (Ecrin du Cathach)
http://www.unc.edu/courses/art111/celtic/catalogue/manuscripts/StCol.html (Cathach)
http://www.usu.edu/history/norm/columb~1.htm (bio saint Columban)
http://www.trin.cam.ac.uk/sdk13/MSS/StChad1.jpg (Chad, folio 71r)
http://www.florin.ms/aleph4.html (folios de Chad)
http://rubens.anu.edu.au/htdocs/bytype/manuscripts/survey/0000/88.JPG (évangiles d'Augustin ou de Canterbury)
 

Les ordres religieux, la vie et l'art, dirigé par Gabriel Le Bras, Flammarion, 1979
L'art du Haut Moyen-Age, de Piotr Skubiszewski, Pochothèque, 1998
 
 
 
 
 

 
 
- - -