ENCYCLOPEDIE -DE--LA--LANGUE -FRANCAISE
-------------ABBAYE--
 menu de l'article "CLUNY"

Le temps des mutations

fin IXe - XIe siècles

Statue de Guillaume de Volpiano, sur l'ambon de la basilique San Giulio de l'île d'Orta, XIIe siècle

 

Guillaume de Volpiano-
--(vers 962- 1031)
.
-Eléments de biographie
1e partie


Guillaume (Guglielmo) est Italien du Piémont, né dans l'île San Giulio, sur le lac d'Orta :

Guillaume possède de par sa haute naissance des liens très étroits avec nombre des princes du moment, que ce soit Hugues Capet ou son successeur Robert II le Pieux, le Duc de Normandie Richard II ou le comte de Dijon Eudes Henri.


 
A cause de son austérité, ses contemporains le nommèrent "Guillaume Outre-Règle". Il se nommait lui-même "serf de la croix du Christ". Guillaume fut d'abord prieur du monastère Saint Pierre de Saint-Saturnin du Port (prieuré près de Pont-Saint-Esprit), avant d'être consacré prêtre et nommé abbé de Saint-Bénigne de Dijon en 989, par Eudes Henri (948-1002, comte de Dijon de 965 à sa mort) avec le conseil de Maïeul. Il fait entrer la réforme clunisienne à Saint-Bénigne de Dijon, avant de la porter dans toute la Bourgogne, en Normandie et en Lorraine, mais aussi chez lui, en Italie.

 
Guillaume de Volpiano est appelé partout et se promène de chantiers en chantiers, aussi bien architecturaux que spirituels. Quand Brun de Roucy, évêque de Langres, fait appel à Cluny pour reconstituer les structures monastiques de son diocèse, c'est Guillaume qui, rappelé de son prieuré, accompagne Maïeul dans cette oeuvre de réforme. Quand l'abbé de Cluny repartit, il laissa toute la charge à Guillaume qu'il avait fait abbé de Saint-Bénigne de Dijon. Avant 996, il est appelé par l'évêque Adalbéron II à Saint-Arnoul, près de Metz. Durant l'hiver 997-998, Odilon de Mercœur (l'abbé de Cluny) est à Rome avec Guillaume, où ils s'occupent des dépendances italiennes de Cluny, telle Saint-Bénigne de Fruttuaria, qu'il fonde en 1001 et à laquelle il apporte la réforme clunisienne. Cette fondation est à la fois l'œuvre de Guillaume et d'Ardouin d'Ivrée (parent de sa maman), roi d'Italie de 1001 à 1015, année où ce dernier se retire en ce monastère juste avant de mourir. Fruttuaria apportera à son tour la réforme clunisienne à d'autres abbayes "filles".

Guillaume n'a pas seulement des talents de réformateur, mais il est aussi architecte, et fait partie des rares maîtres d'œuvre du moyen-âge qui ont laissé leur nom à la postérité. Ses moines suivront ses pas, tel Thierry, de Saint-Bénigne, qui apportera ses réformes architecturales à Jumièges et au Mont Saint-Michel. Guillaume est celui à qui on doit la rotonde de Saint-Bénigne, construite entre 1001 et 1003 avec l'aide de douze moines et des ouvriers venus d'Italie, qu'il dirige lui-même (voir aussi illustration en exergue), ces Maîtres Lombards ou autres Maîtres Comasques (Magistri Comacini), comme on les appelle. D’après Alick McLean "ils venaient probablement de toute l’Italie du nord et formaient une élite bien préparée et organisée en communautés qui avaient déjà le caractère des guildes. Ces groupes de maçons s’appuyaient sur les savoirs-faire du travail de la pierre et de la construction des murs connus depuis l’époque romaine. Les rois Longobards les avaient employés et structurés: vers 643 le roi Rotari avait fait établir un document régissant les normes de construction."

texte extrait de la page web :
http://www.viaoccitanacatalana.org/intro/intro_dettaglio_fra.asp?IDrecord=191

En 714 un autre document établi sous le règne de Liutprand établissait les prix des travaux de construction. C'est la Catalogne qui les voit en premier exercer leurs talents hors d'Italie (notamment aux abbayes de Ripoll ou de Saint-Martin du Canigou).

  Abbaye Saint-Bénigne de Dijon - La rotonde

 

 

 Illustration du XVIIIe siècle

  Plan de Dom Plancher (1734)
 Coupe de la rotonde de l'abbaye Saint-Bénigne, par Dom Plancher (1734)

"A l'époque romane se développe de plus en plus la pratique du pèlerinage. Les édifices antérieurs offrent difficilement un lieu de pratique commode et suffisant pour l'accueil des foules de pèlerins toujours plus nombreuses. Il faut donc trouver des solutions architecturales qui permettent cela. L'expérience de la rotonde figure parmi les premiers essais pour résoudre le problème de la circulation des foules autour des reliques des saints.

Le plan s'inspire de monuments plus anciens, comme les Martyria (Crypte où reposent les corps des saints) ou encore le Dôme du Rocher ou le Saint-Sépulcre (tombeau du Christ) à Jérusalem.

Deux exemples sont à mettre en parallèle :

La rotonde orientale de Saint-Bénigne de Dijon et la rotonde occidentale de Saint-Michel de Cuxa."

Plan de la rotonde occidentale de Saint-Michel-de-Cuxa
due à Oliva de Besalú

"Comparaison entre les deux rotondes



Si les deux monuments sont différents, si l'une est occidentale et l'autre orientale, l'idée est la même : concevoir un vaste ensemble destiné aux pèlerins venus vénérer les reliques (Tombeau de Saint-Bénigne et autres reliques à Dijon ; Langes de la Crèche à Saint-Michel de Cuxa). Pour permettre un accueil plus facile de la foule, pour éviter que cela ne gêne la communauté monastique et pour permettre une circulation plus facile des pèlerins, les deux rotondes comportent un système de double escalier l'un au nord, l'autre au sud, permettant d'établir un "circuit" pour les fidèles. A Dijon, on circule autour d'un puits de lumière central. A Cuxa on tourne autour d'un pilier central. Les deux rotondes comportent plusieurs étages (3 à Dijon, 2 à Cuxa).

Par contre, à Cuxa un atrium permettant la station des fidèles et formant "antichambre" de l'église, est incorporé entre l'église (entrée occidentale) et la rotonde (ceci est une vieille tradition héritée de l'Antiquité); de même la crypte de la Créche est précédée aussi d'une sorte de grand "couloir-atrium" souterrain. A Dijon, la rotonde est directement accolée au chevet de l'église, avec lequel elle communique et elle comporte des chapelles orientales sur trois niveaux, alors qu'à Cuxa ces chapelles sont au niveau de la crypte et latérales (dédiées aux archanges Gabriel et Raphaël). Par ailleurs Oliva place à l'étage supérieur une chapelle de la Trinité. "

Extraits de la page web : http://www.univ-perp.fr/lsh/ens/hist/cours/coursrotonde.htm

C'est à Saint-Bénigne de Dijon que Guillaume fait la connaissance de Raoul Glaber, qui deviendra son élève très dévoué et qui écrira la biographie de Guillaume de Dijon (VITA SANCTI GUILLELMI ABBATIS DIVIONENSIS), demandée par l'abbé de Cluny après sa mort. De son côté, Guillaume l'incitera à écrire (dès 1025) ses fameuses "Historiae" (Histoires).

Puis débute pour Guillaume la grande aventure Normande, appelé tout d'abord par le duc de Normandie Richard II à relever l'abbaye de Fécamp. Nous sommes en 1001 :
voir La Normandie ducale.
 

Vers 1012/1017, Thierry II, beau-frère d'Henri II (l'empereur de Germanie) et successeur d'Adalbéron à l'évêché de Metz (1006 - 1047), donne l'abbatiat de Gorze à Guillaume. La réforme de Guillaume touche l'abbaye de Saint-Arnoul, dans le diocèse de Metz, mais aussi celles de Saint-Evre, Saint-Mansuy et Moyenmoutier, dans le diocèse de Toul. Comme à son habitude, Guillaume met à la tête de ces abbayes dont il a la charge des moines venus de monastères déjà réformés par lui : A Gorze, le prieur est Sigefroy, un clerc messin, qui remplacera ensuite Guillaume comme abbé et Warin, un moine de Gorze, est nommé prieur de Saint-Arnoul, avant d'en devenir l'abbé.
 

Bien entendu, la réforme de Guillaume a une origine clunisienne, mais, nous l'avons dit au chapitre précédent, les coutumes clunisiennes ne pénètrent que peu en Lotharingie germanique. A l'abbaye de Gorze elle-même, il n'y a aucune trace de l'influence clunisienne dans la constitution de la bibliothèque de l'abbaye, pas de trace de culte de ses abbés, non plus. En revanche, pour les monastères réformés par Gorze, quelques traces de l'influence de Cluny peuvent être trouvées, comme le culte de saint Bénigne à Siegburg, ou des éléments de liturgie à Lomboch. C'est donc un champion de la réforme bénédictine que les évêques lorrains ont voulu, en réclamant les services de Guillaume, et non un réformateur purement clunisien.
 

 
Un peu plus tard, en 1027, Eudes de Blois fait appel à Guillaume pour réformer l'abbaye Saint-Faron. Guillaume meut dans son abbaye préférée, celle de Fécamp, en 1031.

voir aussi la vie de Guillaume de Volpiano par Raoul Glaber...en latin.
 

 
Sources :

http://pro.wanadoo.fr/europa.france/abbaye/histoire/histo05.htm (Gorze)
http://www.studiacroatica.com/libros/france/fr0201.htm (Gorze)
http://www.soton.ac.uk/~hi293/Topic2/ (Poppon de Stavelot et Richard de Saint-Vannes)
http://www.univ-perp.fr/lsh/ens/hist/cours/coursvolpiano.htm (Volpiano)
http://dijoon.free.fr/visite/st-benigne.htm (image rotonde)
http://www.univ-perp.fr/lsh/ens/hist/cours/coursrotonde.htm (rotonde Saint-Bénigne)
http://www.orta.net/ita1/isolasgiulio.htm (gravure San Giulio et lac d'Orta)
http://perso.wanadoo.fr/college.claudel.chevigny/patrimoi/crypben.htm
 
 
Raymond Oursel, Invention de l'architecture romane, Collection Introductions, 1970, p. 23-25. aux éditions du Zodiaque.
Monique Jannet-Vallat, L''ancienne abbaye Saint-Bénigne de Dijon, revue Archéologia, n° 316, octobre 1995, p. 35-43.
Anne Wagner, Gorze au XIe siècle, aux éditions BREPOLS, 1996

-------