ENCYCLOPEDIE -DE--LA--LANGUE -FRANCAISE
- LETTRE A
 

Philosophie à Sport - Sciences : Physique

 
Bombe A
7ème partie
Pourquoi le Japon ?


Revenons quelque temps auparavant. La capitulation allemande signée, le seul ennemi subsistant pour les Alliés était le Japon. Celui-ci était de toute façon virtuellement vaincu. Mais encore fallait-il le conquérir. Plusieurs opérations de conquêtes furent envisagées : le plan "Olympic" et le plan "Coronet" principalement. L'objectif était clair : chaque pâté de ruines devait être conquis, l'ennemi ayant comme mentalité de se défendre jusqu'à la mort !

Aucun doute n'était possible sur l'issue de ces combats. Mais la question du prix humain était posée. Le général Marshall estimait que les pertes s'élèveraient au minimum à 500.000 tués, là où la victoire sur l'Allemagne avait entraîné 200.000 morts ! Ils devaient donc envisager d'en perdre le triple pour l'achèvement d'une victoire virtuellement acquise.

Quelques rares dirigeants américains savaient qu'ils pourraient disposer d'une arme nouvelle. Mais devait-on tenir compte des deux bombes en construction dans le cadre du Projet Manhattan pour conquérir le Japon ? A ce moment, la conférence de Potsdam approchait : il s'agissait de définir les conditions de survie de l'Allemagne vaincue. Staline devait aussi y tenir sa promesse prise durant les accords de Yalta selon laquelle l'Union soviétique devrait déclarer la guerre au Japon. Truman et Churchill s'étaient mis d'accord de porter discrètement à la connaissance de Staline l'existence de la Bombe : ils le firent le 24 juillet, mais Truman ne mentionne ni le mot "nucléaire", ni le mot "atomique". Staline n'y prêta que peu d'attention… D'autre part, on tentait alors de rédiger des projets de déclarations exhortant le Japon à ne pas prolonger inutilement les combats. Selon l'avis général, il fallait parler de "reddition inconditionnelle". Plus question d'hésiter : le succès de l'expérience atomique exigeait une décision immédiate !

Un conseil de scientifiques, constitué d'Oppenheimer et de 3 prix Nobel (dont Fermi) est formé : il est pour l'utilisation de la Bombe contre le Japon, afin de convaincre le monde du danger qu'elle représente. D'autre part, de nombreux scientifiques montrent clairement leur opposition à l'utilisation de la bombe contre le Japon (dont Szilard), principalement car ils n'éprouvaient pas pour le Japon une haine comparable à celle pour l'Allemagne. Mais l'avis des scientifiques importe peu, et Truman rédige une demande de reddition inconditionnelle intégrant la menace de l'utilisation de la Bombe. Elle sera signée également par Churchill.

Le 26 juillet, un ultimatum fut adressé au Japon : ou la capitulation, ou l'extermination. Le 28 juillet, l'ultimatum est rejeté. Quatre villes furent désignées : Hiroshima (grand port et ville industrielle), Kokura (principal arsenal), Nigata (port, aciéries et raffineries), et Kyoto (industries). A partir de ce moment, aucune d'elles ne reçut de bombes : il fallait qu'elles soient le moins touchées possibles, afin que la puissance de destruction de la Bombe ne pût être discutée. Les deux bombardements qui suivirent eurent les conséquences que l'on sait (voir introduction).
L'explosion de Fat Man

La Maison Blanche amena à la connaissance du peuple américain le bombardement d'Hiroshima en ces mots, le 6 août 1945 : "Nous venons de lâcher sur le Japon la force d'où le Soleil tire sa puissance. Nous avons maîtrisé l'énergie fondamentale de l'Univers." Le 15, l'empereur japonais annonçait sa capitulation.

Il faut aussi noter que l'Union soviétique ne souhaitait pas une fin rapide du conflit en Extrême-Orient : elle espérait participer à son occupation. Pour ce faire, le conflit devait se prolonger suffisamment longtemps. C'est là qu'apparaît le problème politique et diplomatique relevé plus haut par l'existence de la Bombe. L'utilisation de la Bombe a donc peut-être aussi été un moyen de couper court aux manœuvres russes, et d'éviter un déferlement soviétique en Asie.


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